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16/08/2013

"Il est grand le mystère de la foi"

Francesco Berghetti avait l'air d'un hibou dans le miroir. Il avait mal dormi et perdu l'habitude de se lever d'aussi bonne heure. Quelle idée de lui donner rendez-vous à 8h15 dans une église. Il aurait préféré faire la grasse matinée, tout particulièrement le vendredi saint. Dehors la brume s'étendait sur la ville. L'aube était maussade, pas prête à livrer ses secrets, il en était certain.

Il faisait frais dans la chambre. Berghetti passa un pull et tenta d'ordonner ses cheveux avant d'aller dans la cuisine faire du café et préparer des oeufs brouillés. Puis, il alluma la radio-CD et inséra un disque de Chopin. Il aimait écouter des mazurkas quand il prenait son petit déjeuner, et en particulier la mazurka opus 17 n°4 qu'il lui arrivait parfois de passer en boucle.

Il alla ensuite se doucher. Il espérait que l'eau finirait de le réveiller et fairait disparaître la boule qui commençait à lui comprimer la poitrine. Il s'habilla vite et ferma l'appartement mais arrivé au rez-de-chaussée de l'immeuble il se rendit compte qu'il avait oublié ses clés de voiture. Son trousseau était resté sur le bahut de l'entrée. Il remonta les marches quatre à quatre pour le récupérer. Les minutes étaient comptées. Il ne savait pas combien de temps il mettrait pour effectuer le trajet entre la via di San Domenico et la via della Conciliazione. Lorsque le trafic était fluide il fallait une trentaine de minutes pour parcourir les 6 kilomètres qui séparaient son domicile des portes du Vatican. Or, c'était l'heure de pointe et il redoutait les embouteillages.

Le professeur avait donné rendez-vous à Marcella à 8h sur le parvis de l'église Santa Maria in Transpontina située à deux pas de l'ambassade de Slovénie auprès du Saint-Siège. Marcella avait insisté pour venir avec lui bien qu'il pensât que cette mission pouvait s'avérer dangeureuse.

Caché derrière un lampadaire de l'autre côté de la rue il lui sembla la voir arriver. Elle jetait constamment un regard par-dessus son épaule comme si elle avait le sentiment d'être suivie. 

Aucune des silhouettes qui allaient et venaient ne ressemblait un tant soit peu au professeur Berghetti. Marcella craignait qu'il ne lui arrive quelque chose avant qu'il n'ait le temps de résoudre l'intrigue qui lui avait été soumise. 

Elle jeta un oeil à sa montre. Il était 7h48. Encore douze minutes à patienter dans le froid. Elle grelottait et se sentait un peu faible. Elle n'avait rien pu manger avant de partir. Le dessert de la veille lui était resté sur l'estomac. Elle avait juste bu un thé qui la barbouillait déjà.

La via della Conciliazione était baignée de brume. Les lanternes disposées de part et d'autre de l'église n'éclairaient rien. Le paysage était fantômatique et oppressant. Un décor parfait pour tourner un film ésotérique ou effectuer un incroyable tour de magie. Un peu trop parfait d'ailleurs. Ca n'avait rien de rassurant.

Francesco retrouva Marcella à 7h57. Quand ils entrèrent l'église était plongée dans la pénombre. Seule la lampe du Saint Sacrement luisait à gauche de l'autel. Un silence monacal régnait dans l'édifice. 

Puis, ils aperçurent de la lumière dans la chapelle dédiée à Sant'Angelo, martyr à Licata. Marcella et le professeur approchèrent sur la pointe des pieds pour ne pas attirer l'attention. Les bancs installés pour la célébration étaient pleins, occupés surtout par des religieux. Le reste de l'église semblait déserté. 

 "Il est grand le mystère de la foi". Le curé en était à l'anamnèse. Dans quelques minutes se serait la communion. L'unité divine du Père, du Fils et du Saint Esprit consacrée dans un petit disque qui enlèverait les péchés de chacun. Francesco Berghetti se demandait si la personne qui lui avait donné rendez-vous dans ce lieu était déjà là.

Les gestes du prêtre étaient empreints d'une certaine langueur. Puis, alors qu'il s'apprêtait à donner la communion aux fidèles, ses gestes furent comme suspendus dans l'air... Le ciboire se fracassa sur le sol et les hosties se dispersèrent. Le prêtre chuta sur le marbre. Un point rouge était apparu sur son front. Les fidèles, qui ne réalisèrent pas tout de suite ce qui s'était passé, mirent quelques minutes à lui porter secours. Pendant que les uns appelèrent une ambulance de la Policlinique universitaire Gemelli, les autres scrutèrent la pénombre pour tenter de distinguer le tireur. Mais ils ne virent rien. Ils entendirent simplement la porte de l'église se refermer dans un bruit sourd.

Marcella et le professeur Berghetti s'étaient quant à eux réfugiés derrière une colonne. Ils attendaient le moment propice pour rejoindre la sacristie. Francesco ne voulait pas être retardé par la police. Après avoir traversé de nombreuses pièces et des couloirs ils se retrouvèrent dans le vicolo del Campanile. Il n'y avait pas grand monde. Sans même se concerter ils prirent la direction de la basilique Saint-Pierre. Le ciel était toujours aussi gris. Marcella aurait aimé avoir une gomme pour effacer la brume.

Mais ce jour-là le ciel ne s'éclaircit pas. Il devint même plus sombre à mesure que le temps s'écoulait.

Texte original rédigé pour les Plumes à thème n°12 initiées par Asphodèle. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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Commentaires

Hello La Plume
Hier j'étais passée mais la longueur de ton billet m'avait un peu effrayée pour ce we super chaud à Lyon !
Quelle ambiance. On s'y voit. L'Italie se prête bien à ce genre d'intrigues. Tu as préféré Rome, j'imaginais mieux Venise, mais c'est ton choix !
Un vrai policier en puissance. Tu vas continuer l'histoire ? tu es presque obligée de nous en dire plus !
Bon dimanche et bises de Lyon

Écrit par : Soène | 18/08/2013

Oui, Soène, je vais continuer l'histoire. Si j'ai choisi Rome, c'est qu'elle se prête mieux au thème de la religion. Venise est plus appropriée pour les histoires d'amour même si la série mettant en scène le commissaire Brunetti diffusée sur France3 est extrêmement bien faite.
Belle journée!

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

belle idée pour ce début d'histoire
je suis comme So'N, j'aimerais bien qu'il y ait une suite

Écrit par : patchcath | 18/08/2013

Je devrais mettre les liens vers les épisodes précédents mais c'est assez fastidieux...
Mais soit sûre qu'il y aura une suite. D'ailleurs, on retrouve Rome cette semaine, même si cette fois je mets en scène d'autres personnages. Ils ont leur importance dans l'histoire.

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

Ite missa est !

Écrit par : sable du temps | 18/08/2013

Si!

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

Oh quelle histoire ! Nous voilà revenus au Da Vinci Code.
Belle intrigue, bien menée et j'en ai profité pour écouter l'Opus 17 n°4.
Et la suite ?

Écrit par : Jean-Charles | 18/08/2013

La suite cette semaine mais on retrouve d'autres personnages de l'histoire...

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

J'aime les indications des noms de rues : ça donne un côté exotique pour un pays de la porte d'à côté ! Et ce mystère donne envie et de savoir la suite et d'aller visiter ce pays-là !

Écrit par : Merquin | 19/08/2013

Les noms de rue rendent l'histoire plus "probable". Un vrai plaisir de déambuler dans les différents quartiers de Rome!

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

Je dirais même si j'osais que les voies du Seigneur sont impénétrables, on ne sait pas pourquoi ils sont là, ils ne se connaissent pas, donc il faut une suite pour démêler les fils cathod(l)iques de cette looongue histoire ; c'est mystère dans la brume de l'encensoir !!! :lol: On se croirait vraiment à Rome et comme JC, j'y ai trouvé un air de Da Vinci Code ! ;) Bravo !

Écrit par : Asphodèle | 19/08/2013

Merci Aspho pour ce gentil commentaire!
Marcella et le professeur se connaissent déjà en fait mais je n'ai pas mis de liens vers les épisodes précédents. (Tâche assez fastidieuse.)
Les deux personnages se sont rencontrés bizarrement et leurs destins se sont trouvé liés. Je ne sais pas comment leur relation va évoluer car Marcella en aime un autre... Mais le plus important est l'intrigue policière, bien entendu.

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

La gomme pour effacer la brume s'impose; celle dans laquelle baignent tes lecteurs qui attendent la suite...

Écrit par : celestine | 19/08/2013

Je ne pense pas que le texte de cette semaine t'éclaire davantage sur l'intrigue. Tout est toujours mystérieux à Rome...

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

Bravo pour ce texte à la fois très visuel et auditif : j'ai entendu la porte se refermer dans un bruit sourd
Très mystérieux .....

Écrit par : valentyne | 22/08/2013

Oui, mystérieux, c'était l'effet recherché. J'aime bien donner des détails aux lecteurs. Les détails visuels et auditifs permettent d'imaginer le décor et de se représenter une scène qui est en train de se jouer.

Écrit par : La Plume et la Page | 23/08/2013

Tu nous promène dans les méandres de bien étranges histoires, j'espère que tu vas continuer. :D J'adore ! :D

Écrit par : ceriat | 24/08/2013

Oui, oui, la suite est prévue... Depuis l'automne 2012 je me balade à Rome et dans quelques coins d'Italie avec des personnages attachants. Je ne vais pas les abandonner comme ça!

Écrit par : La Plume et la Page | 24/08/2013

Les commentaires sont fermés.