Les dimanches poétiques (263)

"Nous délaissent sans prévenir les plus beaux de nos jours, et les larmes viennent après, dans les après-midi rejouées de solitude et de remords, quand nous avons atteint l'âge du regret et celui des retours. Les visages et les gestes que nous traquons dans l'ombre des puits de nos mémoires, les rires, les bouquets, les caresses, les silences boudeurs, les taloches aimantes, l'amour et le don de ceux qui nous mènent au seuil de la vie creusent notre souffrance autant qu'ils nous apaisent."

Philippe CLAUDEL in Le Café de l'Excelsior (Ed. Le Livre de Poche - 2007)

Les dimanches poétiques (262)

"En marchant, seul, dans l'allée centrale, je jette un coup d'œil sur les tombes. C'est toujours très émouvant tous ces gens qui nous ont quittés, et qui sont pourtant toujours là, dans la terre, se rappelant à nous. Ce sont des étrangers pour moi, j'ai cependant l'impression de les connaître. Ils nous rappellent tous un vieil oncle, un cousin, une grand-mère que l'on a perdus. Ils nous rappellent la mort, aussi, qui est là et nous attend, plus ou moins patiente."

Romain PUERTOLAS in La police des fleurs, des arbres et des forêts (Ed. Albin Michel - 2019)

Les dimanches poétiques (261)

"Tous les témoignages de l'époque sont admiratifs: agilité d'esprit, intelligence brillante, grande culture, l'étudiant Wojtyla surpasse ses petits camarades. Sa capacité de travail est exceptionnelle. Son intelligence, aussi. Nul ne s'étonne que, à la fin de sa dernière année d'études, il obtienne la note la plus haute: eminente. En sus, il est chaleureux, ouvert, robuste. C'est déjà un type à part."

Bernard LECOMTE in Jean-Paul II (Ed. Gallimard - 2003)

Les dimanches poétiques (260)

"Je savais qu'au-delà de ces bois le monde était en flammes, attisé chaque jour par l'avidité des hommes, leur insatiable voracité. Ils n'en avaient jamais assez. Pour voir passer à leurs pieds des fleuves d'argent, ils détruisaient tout, les êtres vivants, les forêts, les océans, les rivières et les nuages, ils saccageaient les entrailles de la terre, souillaient le ciel. Toujours inassouvis, aux aguets, jaloux, affûtant nuit et jour les mille ruses de leur égoïsme."

René FREGNI in Dernier arrêt avant l'automne (Ed. Gallimard - 2019)

Les dimanches poétiques (259)

"Mon amour,

Maintenant, tu me manques. Il me faut la soirée de lundi, ton bras, le Veineux, la 32! Marre de travailler tout le temps! Et pourtant, il le faut. Pourquoi? Pour qui? Pour nous. Pour eux. La "société" est devenue un désert complet, une spirale d'inanité et d'oubli. Envie de retrouver personne. Sauf toi! Et encore toi. Et toujours toi. [...]"

Philippe SOLLERS in Lettres à Dominique Rolin 1981-2008 (Ed. Gallimard - 2019)

Les dimanches poétiques (258)

"Mon amour

Je ne te dis jamais assez que je t'aime, c'est là le problème. Si je m'écoutais, je te téléphonerais toutes les dix minutes, cela deviendrait hallucinant, donc, note bien que je suis fou (de toi). Voilà bien la chose la plus raisonnable que j'ai faite de ma vie (être fou de toi). Petite femme d'amour, on est au cœur des choses. Des choses? Même pas: au cœur du cœur. Le Cœur absolu (bon titre, quand on y pense). [...]"

Philippe SOLLERS in Lettres à Dominique Rolin 1981-2008 (Ed. Gallimard - 2019)

 

 

Les dimanches poétiques (257)

"J'avais appris que la patience était une vertu suprême, la plus élégante et la plus oubliée. Elle aidait à aimer le monde avant de prétendre le transformer. Elle invitait à s'asseoir devant la scène, à jouir du spectacle, fût-il un frémissement de feuille. La patience était la révérence de l'homme à ce qui était donné."

Sylvain TESSON in La panthère des neiges (Ed. Gallimard - 2019)