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01/03/2013

Vertige de l'amour

Tiberio essayait de se remémorer ce moment intense et délicieux qui l'avait uni à Marcella quelques heures plus tôt. Un moment fusionnel, érotique à souhait, à deux doigts de la folie. Un moment à rendre dément l'homme le plus sain d'esprit qui soit. 

Il se remémorait les détails... La lingerie rouge qu'il devinait à travers son chemisier avait attisé le feu. La fulgurance du désir s'était vite transformée en obsession. Toute la soirée, au salon et puis à table, il n'avait pensé qu'à ça: effeuiller la jolie fleur, croquer le fruit mûr. C'avait été comme danser au bord d'un gouffre.

Marcella avait, comme d'habitude, de jolis pendants d'oreilles. En baissant un peu les yeux il avait examiné son décolleté. Résister pendant tout le repas avait été un véritable calvaire. Lui, les cheveux fraîchement coupés, portait une chemise vichy bleu dont il avait retroussé les manches. Un pantalon de toile beige et des chaussures bateau venaient compléter sa tenue. Il était fringant, parfumé au Kouros. 

En sortant du restaurant il avait à peine regardé les goélettes illuminées et avait croisé des individus sans vraiment les voir. Ce qui retenait toute son attention était accroché à son bras. Flavio avait presque dû l'implorer pour aller voir un film. Les vacances, prochaines, s'annonçaient difficiles pour le jeune adolescent. Des congés pendant lesquels il devrait certainement partager son père avec Marcella. Tiberio était amoureux. Cela sautait aux yeux.

D'ailleurs Tiberio et Marcella étaient comme sourds. Ils n'entendaient plus le monde extérieur. Ils ne virent pas non plus les policiers patrouiller à proximité du presbytère en rentrant à la pension de famille. Cependant, ils savaient précisément vers quoi ils se dirigeaient. Ce n'était pas un égarement. Depuis quelques semaines déjà ils passaient de plus en plus de temps ensemble et avaient beaucoup de mal à se quitter. Ils étaient prêts à franchir une étape. Ils ne s'interrogèrent pas sur le devenir de cette histoire d'amour qui commençait. Ils étaient certains qu'elle s'épanouirait merveilleusement.

Ce texte a été rédigé pour l'édition 92 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia, combiné avec l'édition 4 des Plumes à thème initiées par Asphodèle. Ce texte n'est pas libre de droit, la photo non plus

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09/02/2013

Le brouhaha des onomatopées

Tiberio attendait la fin de la semaine avec impatience. Il se sentait de plus en plus fatigué. Le surmenage des dernières semaines y était sans doute pour quelque chose. Bien qu'il n'eût pas dépassé la cinquantaine sa jeunesse était loin. Il n'avait plus la même énergie. Puis, il avait mis quelque temps à prendre ses marques dans ce nouvel environnement. Il avait aussi davantage de responsabilités.

Les nouvelles politiques sur la restructuration des universités avaient nécessité de multiples réorganisations des services au sein de la faculté. Un surplus de travail auquel il avait également fallu faire face sans broncher au risque sinon de se faire virer comme un malpropre. Le doyen n'était pas réputé pour être conciliant. A force de patience et de persévérance Tiberio avait malgré tout réussi à rendre le climat moins tendu avec la tête chenue. Il avait même pu lancer une grande enquête sur les habitudes de restauration des étudiants et analyser leurs besoins afin de réduire les coûts du restaurant universitaire.

Mais il était aussi impatient que la semaine se termine pour emmener Flavio et Marcella à Fiumicino. La ville maritime accueillait pendant une semaine un rassemblement de vieux gréements, messagers d'un autre temps... et d'autres moeurs. Il avait réservé une chambre dans une pension de famille de la via Porto Romano d'où ils pourraient rejoindre les quais à pied. Il entendait déjà le brouhaha des onomatopées accueillant les bateaux.

Ce texte a été rédigé pour l'édition 91 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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02/02/2013

Elle avait débarqué dans sa vie bizarrement

Berghetti marchait de mieux en mieux. Sa jambe ne le faisait quasiment plus souffrir. L'oraison ne serait pas pour tout de suite. Mais il se demandait jusqu'où les gardiens de Saint-Pierre étaient prêts à aller pour le dissuader de continuer ses recherches. 

Le professeur n'était cependant pas du genre à abandonner la partie, quitte à livrer une guerre, fût-elle inégale. Il cherchait toujours un moyen de s'infiltrer dans le palais pontifical, et surtout la personne qui pourrait s'y introduire sans éveiller les soupçons. 

Chaque vendredi Francesco Berghetti se rendait à la piscine pour une séance de rééducation. Marcella avait accepté de l'y conduire et l'attendait à la cafétéria. Elle lui avait rendu de multiples services depuis leur première rencontre dans la via di Santa Dorotea. Elle avait par ailleurs réveillé sa sensibilité. Les années à arpenter l'université l'avait blazé de pas mal de choses et ses jugements envers ses pairs étaient devenus implacables au fil du temps. Beaucoup de ses collègues le snobaient bien qu'il jouît d'une belle réputation dans toute l'Italie et même au-delà des frontières du pays. Marcella ne s'était pas échappée dès que l'opération avait été terminée. Elle se sentait concernée par le sort du professeur et elle avait réussi à l'apprivoiser. Un lien s'était créé entre eux. Un lien auquel il s'accrochait chaque jour un peu plus.

La jeune femme avait débarqué dans sa vie bizarrement, dans une circonstance inattendue. Il remerciait tous les jours Sainte Rita de l'avoir placée sur son chemin. Son aide avait été providentielle. Marcella l'avait convaincu d'expérimenter de nouveaux traitements contre la douleur et ceux-ci s'étaient révélés très efficaces. Pourquoi avait-il suivi son conseil lui qui d'ordinaire accordait peu de crédit à ce que disait son entourage? Pourquoi avait-il envie de croire en elle? Il repensait souvent au Pygmalion de Bernard Shaw et au mythe du vieux professeur qui tombe amoureux de son élève. Une pensée qu'il s'empressait de chasser d'un clignement furtif des paupières.

- "Madame, puis-je avoir l'addition s'il vous plaît?"

La serveuse, au cou de laquelle pendait une chaîne avec un pendentif en forme de serpent, revint quelques minutes plus tard avec le compte. Son repas s'élevait à 15,40 euros. Il trouva que c'était un peu cher pour des pâtes à la carbonara et des tranches de cornichons aigre-doux. De plus l'établissement était bruyant. Il n'y reviendrait sûrement pas.

Ce texte a été rédigé pour les éditions 89 et 90 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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18/01/2013

Ne pas laisser faire le diable

Midi venait de sonner à l'église Santa Dorotea et le père Paulo commença à se préparer pour se rendre à Saint-Pierre. Cela ne servait plus à rien d'attendre l'appel du père Stefano. Si l'opération avait échoué il l'aurait su. Il espérait que Berghetti avait bien eu la frousse. Quel mécréant! Prouver mathématiquement l'existence de Dieu... Pour qui ce professeur se prenait-il? S'il l'avait eu devant lui il l'aurait châtré de ses propres mains.

Il avait écouté attentivement le père Stefano décrire les tenants et les aboutissants de l'affaire et n'avait pu qu'adhérer au projet. Il n'était pas question de laisser faire le diable. Il fallait agir et au plus vite. Comme lui, trois autres prêtres de la cité romaine avaient été choisis pour accomplir cette délicate tâche. Le souverain pontife n'était pas du genre à s'en laisser conter mais ils seraient persuasifs. Alors qu'il quittait l'église, le père Paulo aperçut une jeune femme soutenant un homme qui semblait avoir du mal à marcher. En approchant il reconnut le professeur Berghetti mais se demanda qui pouvait bien être celle qui l'accompagnait. Il dépassa l'étal de l'épicier sans se retourner malgré l'envie de voir dans quelle direction se dirigeaient le blessé et son aide. La femme avait l'air toute chose, comme perdue au milieu de l'océan, le regard rivé sur l'homme qu'elle portait.

Paulo eut à peine un regard pour les pauvres ères toujours affalés près du pont Sisto. Il bifurqua vers le Longotovere della Farnesina en direction de Saint-Pierre. Le rendez-vous était à 15h. Il irait à pied. Il avait largement le temps.

Ce texte a été rédigé pour l'édition 88 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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13/12/2012

Des âmes vertueuses en soutanes noires

Par un curieux hasard Tiberio se retrouva sur le parvis de la basilique Saint-Pierre. Ses pieds l'avaient guidé jusque-là il ne sut pas comment. Il hésita à franchir les portes  décorées de somptueuses ferronneries. Il y était entré quelques jours plus tôt, avec Flavio, et l'édifice lui avait fait forte impression. Son fils avait lui aussi été ébahi par la richesse des décorations. Il y régnait une atmosphère mystérieuse. En déambulant dans les travées ils avaient aperçu quelques âmes vertueuses en soutanes noires, à la fois muettes et évanescentes. La basilique était gigantesque. Elle pouvait intimider les visiteurs, voire leur faire peur.

Ils étaient descendus dans la crypte où reposaient les papes. L'endroit ressemblait à un abîme de galeries avec des alcôves de part et d'autre. Pas de héros ici. Simplement des hommes plus ou moins charismatiques qui avaient servi un Dieu auprès duquel leur âme s'était réfugiée et que les fidèles attendaient encore. En ressortant de la crypte ils s'étaient assis sur un banc en bois de tilleul pour admirer la coupole et prier un moment. Tout était grandiose. Ils avaient du mal à détacher leur regard des fresques. Les chapelles étaient plus belles les unes que les autres.

Tiberio était perdu dans ses pensées. Après avoir admiré la façade de la basilique il tourna les talons et se décida à rentrer chez lui. La journée avait été éprouvante. Pour se remonter le moral il prévoyait déjà d'emmener Flavio manger une grosse pizza en espérant que le chef ne la laisserait pas racornir dans le four comme la dernière fois. Alors qu'il désserrait le noeud de sa cravate rouge à pois, il entendit son téléphone portable sonner. C'était Marcella qui l'appelait pour lui dire qu'elle l'invitait à dîner avec Flavio. Elle prévoyait de leur concocter quelques antipastis. Un prélude à une pizza au Gorgonzola. Finalement, la soirée s'annonçait bien meilleure qu'il ne l'avait imaginé.

Ce texte a été rédigé pour l'édition 85 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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07/12/2012

A la conquête des chiffres...

Tiberio venait de recompter deux fois le montant des inscriptions mais il ne trouvait pas la même chose que sa secrétaire. Il tenta de localiser le problème. Il n'allait quand même pas passer trois jours là-dessus. Heureusement, les notes de frais du doyen de la fac tombaient juste. Mais il lui restait encore à vérifier les factures des fluides et les recettes du restaurant universitaire. 

L'erreur de calcul se tranforma peu à peu en cauchemar. Plus il recomptait, moins il s'approchait du montant trouvé par la secrétaire. Voyant qu'il n'arriverait à rien il décida d'aller s'aérer les méninges et se dirigea vers le distributeur. Il commanda à la machine un thé glacé. Les touches, reliées à un invisible mécanisme, lui jouèrent un mauvais tour. Au lieu d'un thé glacé, il obtint un yaourt aromatisé au citron. Cela aurait provoqué habituellement une certaine hilarité chez lui mais ce jour-là, il n'était pas d'humeur à rire. Il se dit qu'un yaourt ne lui donnerait pas  plus que du thé la solution du problème. Il l'aiderait au mieux à passer l'après-midi sans avoir trop faim. La diète qu'il suivait depuis deux semaines était difficile. Une période dont il se serait bien passé si le médecin ne l'avait exigé.

La mort dans l'âme il repartit à la conquête des chiffres qui depuis quelques heures étaient l'unique objet de ses pensées. Avait-il additionné deux fois le même nombre ou bien avait-il multiplié un montant par inadvertance?

Ce texte a été rédigé pour l'édition 84 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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01/12/2012

Le coeur serré

Marcella se précipita pour secourir le professeur Berghetti et surtout pour le soutenir afin qu'il ne s'effondre pas au milieu de la rue. Il passa son bras autour du cou de la jeune femme et lui indiqua l'adresse d'un cabinet médical dans la via di Porta Settimiana. Marcella le surveillait du coin de l'oeil. Elle craignait qu'il perde connaissance avant d'atteindre la salle de consultation du médecin.

Elle n'osa pas lui demander pourquoi il ne s'était pas dirigé vers l'hôpital le plus proche. D'ailleurs elle ne lui posa aucune question. Le chemin n'en finissait pas. Partout des regards inquisiteurs.

Lorsqu'enfin ils furent à destination la secrétaire accouru vers eux et leur demanda, avec un fort accent provincial, ce qui s'était passé. Reconnaissant le frère du médecin elle se précipita dans la salle de consultation pour prévenir le docteur Berghetti. Il ressemblait comme deux gouttes d'eau à celui que Marcella avait escorté jusque là. Pasquale Berghetti comprit immédiatement que c'était grave et expédia le patient qu'il était en train d'ausculter quelques minutes plus tôt.

Marcella aida le blessé à s'asseoir sur la table d'examination. Puis, le professeur Berghetti relâcha son emprise. Mais, sans le faire exprès, il attrapa l'une des boucles d'oreille en corail de la jeune femme qui échut sur le sol et se fracassa en plusieurs morceaux. Marcella eut le coeur serré en voyant sa boucle  à terre. Cependant elle se dit que ce n'était rien comparé au malheur qui venait de frapper le professeur Berghetti. Sa jambe n'était pas belle à voir.  

Son frère lui fit une piqûre et le somma d'avaler un médicament qu'il venait de diluer dans un verre d'eau. Un médicament au goût amer; un composé très puissant censé calmer la douleur. Le docteur Berghetti savait qu'il allait avoir besoin d'aide et essaya de jauger rapidement la jeune femme qui avait amené son frère. Serait-elle capable de le seconder pendant l'intervention? C'était la première fois qu'il allait faire ça et il n'avait pas envie que l'opération tourne mal.

Ce texte a été rédigé pour l'édition 83 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.

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