01/12/2012
Le coeur serré
Marcella se précipita pour secourir le professeur Berghetti et surtout pour le soutenir afin qu'il ne s'effondre pas au milieu de la rue. Il passa son bras autour du cou de la jeune femme et lui indiqua l'adresse d'un cabinet médical dans la via di Porta Settimiana. Marcella le surveillait du coin de l'oeil. Elle craignait qu'il perde connaissance avant d'atteindre la salle de consultation du médecin.
Elle n'osa pas lui demander pourquoi il ne s'était pas dirigé vers l'hôpital le plus proche. D'ailleurs elle ne lui posa aucune question. Le chemin n'en finissait pas. Partout des regards inquisiteurs.
Lorsqu'enfin ils furent à destination la secrétaire accouru vers eux et leur demanda, avec un fort accent provincial, ce qui s'était passé. Reconnaissant le frère du médecin elle se précipita dans la salle de consultation pour prévenir le docteur Berghetti. Il ressemblait comme deux gouttes d'eau à celui que Marcella avait escorté jusque là. Pasquale Berghetti comprit immédiatement que c'était grave et expédia le patient qu'il était en train d'ausculter quelques minutes plus tôt.
Marcella aida le blessé à s'asseoir sur la table d'examination. Puis, le professeur Berghetti relâcha son emprise. Mais, sans le faire exprès, il attrapa l'une des boucles d'oreille en corail de la jeune femme qui échut sur le sol et se fracassa en plusieurs morceaux. Marcella eut le coeur serré en voyant sa boucle à terre. Cependant elle se dit que ce n'était rien comparé au malheur qui venait de frapper le professeur Berghetti. Sa jambe n'était pas belle à voir.
Son frère lui fit une piqûre et le somma d'avaler un médicament qu'il venait de diluer dans un verre d'eau. Un médicament au goût amer; un composé très puissant censé calmer la douleur. Le docteur Berghetti savait qu'il allait avoir besoin d'aide et essaya de jauger rapidement la jeune femme qui avait amené son frère. Serait-elle capable de le seconder pendant l'intervention? C'était la première fois qu'il allait faire ça et il n'avait pas envie que l'opération tourne mal.
Ce texte a été rédigé pour l'édition 83 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
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23/11/2012
Deux cygnes noirs remontaient le Tibre
Quelques personnes ricanèrent sur son passage mais il ne dit rien. Il était vidé. Il continua à marcher en direction du pont Sisto en hoquetant. Il progressait lentement. Sa jambe le faisait horriblement souffrir. Il avait de plus en plus de mal à supporter la douleur. Sa veste était dépenaillée et son pantalon ensanglanté. Lorsqu'il fut sur le pont il aperçut deux cygnes noirs qui remontaient le Tibre en direction du château Saint-Ange. Noirs, comme la couleur du chaos. La surface de l'eau bougeait à peine mais lui tanguait. Il se cramponna au muret pour éviter la chute. Il n'avait pas envie de se faire remarquer.
Il espérait que son frère, médecin, réussirait à extraire le projectile entré dans la chair mais il fallait auparavant qu'il parvienne à atteindre son cabinet. Il ne restait que quelques centaines de mètres or il n'était pas certain de pouvoir les parcourir dans son état. Sa jambe pissait le sang. Il avait fait un garrot à la va-vite quand il avait été certain que les cambrioleurs étaient partis. Heureusement la pièce était déserte quand ils avaient fait irruption. Il n'y avait que lui. Il avait essayé de s'enfuir dans une salle voisine mais l'un des malfrats avait visé ses jambes.
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Marcella retira sa deuxième tournée de linge de la machine et étendit les affaires sur le balcon. Un temps superbe pour faire sécher des vêtements dehors. Elle habitait via di Santa Dorotea, non loin de l'église du même nom. Elle vivait là depuis bientôt six ans. C'était un quartier agréable et proche de son travail même si c'était souvent difficile d'y garer sa voiture.
Lorsqu'elle eut terminé d'accrocher le linge elle se décida à aller chez l'épicier bio à quelques pas de l'immeuble. Mais à peine la porte du bâtiment refermée elle se figea. Devant elle se tenait un homme livide, chancelant. Elle le reconnut tout de suite. C'était Francesco Berghetti, un éminent professeur de théologie et chercheur à la faculté de philosophie de Rome. L'un des plus doués de sa génération. Ses travaux étaient multiples. Il avait entre autres recensé les thèses des mathématiciens qui avaient tenté de démontrer l'existence de Dieu par de savants calculs. Marcella avait assisté à plusieurs de ses conférences, lesquelles rencontraient à chaque fois un franc succès.
Ce texte a été rédigé pour l'édition 82 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
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17/11/2012
Anesthésiée par un doux baiser
Tiberio s'approcha d'elle, la prit par les épaules et la serra tout contre lui. Il avait envie de déposer un baiser sur sa nuque. Une légère brise faisait onduler quelques mèches de cheveux qui s'étaient échappées de son chignon. Son parfum, frais et délicat, était grisant. Tiberio se décida enfin à l'embrasser. Un instant magique. Le temps semblait s'être arrêté. Il ne voyait plus les passants qui allaient et venaient autour d'eux. Marcella ne disait rien. Elle ne bougeait pas, comme anesthésiée par le doux baiser qui venait d'être déposé sur sa peau.
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16/11/2012
En flânant le long du fleuve
Marcella s'arrêta sur le pont Sisto. Elle regarda l'eau du Tibre s'écouler sous ses pieds. Une légère brise faisait ondoyer la surface dans un camaïeu orangé. Le coucher de soleil était beau. Comme elle beaucoup de passants s'arrêtèrent pour profiter des dernières lueurs de la journée. Trois vieilles femmes s'étaient accoudées au muret de pierres. Elle tendit l'oreille mais ne parvint pas à entendre disctinctement ce qu'elles racontaient.
Elle ne se lassait pas de marcher dans la ville. Elle avait d'ailleurs visité tous les quartiers à pied. Dès qu'elle avait un peu de temps elle chaussait ses baskets et allait se balader. Il lui arrivait parfois de faire plusieurs kilomètres. Elle allait jusqu'à Saint-Pierre et revenait en flânant le long du fleuve. C'était un loisir comme un autre. Un plaisir.
Malgré la pollution les jours de grande chaleur et les miasmes des détritus qui s'accumulaient parfois dans les rues, Rome était une ville agréable. Marcella allait le plus souvent travailler à pied. Elle était employée au consulat de la République française, situé via Giulia, à deux cents mètres à vol d'oiseau du Palais Farnese. Elle connaissait le trajet par coeur. Elle aurait pu y aller les yeux fermés. Elle y allait à pied sauf, bien sûr, lorsque sa gorge était irritée par le froid piquant de l'hiver. Elle s'y rendait alors en bus. Mais le trajet était loin d'être direct. Les lignes de bus passaient pour la plupart par le pont Garibaldi ce qui lui faisait faire des détours interminables et l'obligeait à partir une demi-heure plus tôt.
Ce qu'elle aimait tout particulièrement quand elle avait un moment de libre, c'était de retrouver quelques amis à la "Bonne cuisinière" pour manger un morceau et d'aller ensuite au "Rendez-vous des acteurs" pour boire un dernier verre. Elle avait d'ailleurs proposé au nouveau voisin de l'accompagner lors d'une de ses virées nocturnes. Une soirée simple, autour d'un bon plat, qui lui avait visiblement fait plaisir. Tiberio était jovial et subtil. Après avoir été douze ans intendant de la prison de Venise, il était depuis peu économe à la faculté de philosophie de Rome. Il avait été désigné parmi une dizaine de candidats aux profils très divers. Il avait un peu appréhendé ce changement de vie, surtout pour son fils Flavio. Mais le gamin s'était bien habitué à la capitale italienne. Il s'était rapidement fait de nouveaux copains. A chaque fois qu'il croisait Marcella ils se saluaient avec effusion. Le courant était bien passé entre eux. Certains samedis elle allait même le voir jouer au foot.
Ce texte a été rédigé pour l'édition 81 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
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Haut-le-coeur!
James avait réussi à semer ses poursuivants. Il se trouvait maintenant dans une rue étroite qui abritait quelques restaurants. Il eut un haut-le-coeur. L'odeur qui s'échappait des différents établissements semblaient provenir de plats recuits dont il n'aurait voulu manger pour rien au monde. La rue était pour ainsi dire aveugle, éclairée seulement devant les restaurants par quelques lampions blancs gravés de caractères chinois.
Il ne s'arrêta pas. Les hommes qui étaient à ses trousses étaient sûrement en train d'inspecter les restaurants, ouvrant le plus petit placard pour voir s'il ne s'y cachait pas. Il fallait qu'il arrive à trouver une cachette sûre pour reprendre son souffle et éventuellement y passer la nuit. Ca lui permettrait de réfléchir à la meilleure solution pour sortir du quartier.
Ce texte a été rédigé pour le Blog à 1000 mains. Il n'est pas libre de droits et la photo de Xave non plus.
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10/11/2012
Une vraie banquise!
Marcella était sortie de l'ascenseur en apnée. Elle ne respirait plus depuis que le voisin du 3ème, originaire de Venise et qui avait emménagé deux semaines auparavant avec son fils, avait plongé ses yeux verts dans les siens. Elle avait baissé la tête et regardé ses chaussures, le souffle coupé. Elle avait hâte d'arriver au rez-de-chaussée, sentant ses joues virer à l'écarlate. Elle se précipita si vite hors de l'engin qu'elle fallit s'étaler sur le pavé que le concierge venait de laver. Une vraie banquise! Elle fit une pirouette et se raccrocha in-extremis à la rembarde de l'escalier.
L'emménagement de ce nouveau voisin avait eu quelques conséquences sur la vie de l'immeuble. Les habitants avaient été privés d'eau chaude pendant deux jours et il y avait eu un dysfonctionnement du circuit électrique. Il avait fallu appeler les dépanneurs au beau milieu du week-end pour qu'ils effectuent une vérification de tout le système. Marcella aurait préféré un canular. Elle s'en souviendrait longtemps de ce week-end! Elle avait justement invité des amis à dîner. Faute de pouvoir utiliser les plaques électriques elle avait dû aller chercher des plats froids chez un traiteur et faire une provision de bougies pour ne pas passer toute la soirée dans le noir. Elle gardait en mémoire la lueur des flammes faisant scintiller le tissu satiné des rideaux et la cape en soie rouge dans laquelle elle s'était emmitouflée. C'avait été une soirée un peu improvisée.
Pendant quelques jours le voisin avait longé les murs, craignant que les habitants ne lui tombent dessus. Mais ils avaient vite oublié l'affaire, trop occupés par leur train-train quotidien. Marcella avait juste échangé quelques mots avec lui sur le temps et les activités de son fils qu'il conduisait aux tournois de foot. Flavio avait une admiration sans bornes pour la Juventus de Turin.
Marcella n'avait pas osé lui poser trop de questions mais elle avait su ce jour-là qu'il était originaire de Venise. Elle l'avait senti susceptible et ne voulait pas l'ennuyer. Elle ne voulait pas non plus paraître indiscrète. Elle l'avait alors salué et avait regardé ce qu'il y avait dans sa boîte à lettres. Quelques brochures dont une, provenant d'une église évangélique, donnait quelques pistes pour pardonner à ceux qui avaient menti. Il y en avait trois pages. Marcella glissa aussitôt cette feuille et quelques autres dans le bac du tri sélectif.
Ce texte a été rédigé pour l'édition 80 du jeu Des mots, une histoire initié par Olivia. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
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02/11/2012
Ciao Tiberio!
Beaucoup de fleurs avaient été livrées. La sépulture disparaissait sous des roses blanches et des ancolies bleutées. Quelques pivoines également. Elles embaumaient l'atmosphère. Une foule d'amis et d'inconnus défila devant la tombe pour rendre un dernier hommage à Tiberio. Tous, par ailleurs, tenaient à manifester leur sympathie à Marcella et Flavio, la compagne et le fils du disparu.
La cérémonie avait été sobre, l'oraison funèbre admirable. Marcella avait essayé de rester forte pour le petit mais elle était ravagée par la douleur. Les médecins ne s'étaient pas trompés. Le scanner de la tête n'avait laissé aucun doute. La tumeur n'était pas opérable et l'état de Tiberio n'avait fait qu'empirer jusqu'à l'issue fatale.
Des larmes perlaient à ses cils. Elle détournait le visage pour cacher son chagrin à Flavio dont elle était désormais la tutrice légale. Elle ne voulait pas se montrer abattue par la disparition de son compagnon. Elle devait rester forte pour lui.
La succession ne posa pas de problème. Tiberio avait fait de Marcella sa seule légataire. Comme elle lui avait promis elle emmena Flavio au carnaval de Venise l'année suivante. Le gamin avait été émerveillé par les costumes aux couleurs chatoyantes. Les acclamations fusaient à leur passage. Une ribambelle de touristes avaient fait le déplacement pour l'occasion. Les masques avaient également retenu leur attention. Ils étaient splendides, piqués de plumes et de fleurs multicolores. L'attrait du carnaval était tel que le cheminement s'avérait parfois difficile dans les rues et sur les campi. Mais ils avaient passé un merveilleux moment. Flavio était ravi. C'est tout ce qui comptait pour Marcella.
Ce texte a été rédigé pour l'édition 1 des Plumes... initiées par Asphodèle. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
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