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06/01/2013

Les dimanches poétiques (90)

- "Dommage que les écrivaillons n'aient pas été là pour le voir, ceux qu'on a jetés sur le bûcher où on brûlait leurs bouquins. Le beau, c'est de réduire à néant ce qui est laid, bon à rien, subversif. Ce qui ne se laisse pas mettre au pas.

Elle comprit qu'il n'attendait pas de réponse.

- Le beau, c'est ce qui bouleverse notre routine. Ce qui renverse tout ce qu'on croyait savoir. Ce qui secoue tous les sens, comme si des écailles te tombaient des yeux. Tu te réveilles enfin de ce qui n'était qu'un rêve dans le noir."

Arnost LUSTIG  Elle avait les yeux verts

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16/12/2012

Les dimanches poétiques (89)

L'Enfant Jésus de Prague - Paul CLAUDEL

Il neige.

Le grand monde est mort sans doute. C'est décembre.

Mais qu'il fait bon, mon Dieu, dans la petite chambre!

La cheminée emplie de charbons rougeoyants

Colore le plafond d'un reflet somnolent,

Et l'on n'entend que l'eau qui bout à petit bruit.

Là-haut sur l'étagère, au-dessus des deux lits,

Sous globe de verre, couronne en tête,

L'une des mains tenant le monde, l'autre prête,

A couvrir ces petits qui se confient à elle,

Tout aimable dans sa grande robe solennelle

Et magnifique sous cet énorme chapeau jaune,

L'Enfant Jésus de Prague règne et trône.

Il est tout seul devant le foyer qui l'éclaire

Comme l'hostie cachée au fond du sanctuaire,

L'Enfant-Dieu jusqu'au jour garde ses petits frères.

Inentendue comme le souffle qui s'exhale,

L'existence éternelle emplit la chambre, égale

A toutes ces pauvres choses innocentes et naïves!

Quand il est avec nous, nul mal ne nous arrive.

On peut dormir, Jésus, notre frère, est ici.

Il est à nous, et toutes ces bonnes choses aussi:

La poupée merveilleuse, et le cheval de bois,

Et le mouton sont là, dans ce coin tous les trois.

Et nous dormons, mais toutes ces bonnes choses sont à nous!

Les rideaux sont tirés... Là-bas, on ne sait où,

Dans la neige et la nuit sonne une espèce d'heure.

L'enfant dans son lit chaud comprend avec bonheur

Qu'il dort et que quelqu'un qui l'aime bien est là,

S'agite un peu, murmure vaguement, sort le bras,

Essaye de se réveiller et ne peut pas.

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08:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook |

09/12/2012

Les dimanches poétiques (88)

"Dire qu'il y avait là, à la même heure, des parents à qui Noël n'apportait aucune joie! des hommes, des femmes, ne sachant pas tout ce qu'un simple mot, vieux de deux mille ans, contient de tendre poésie! Noël! Noël! fête des grands, fête des petits, le plus joli jour de l'année!

Plusieurs fois dans la matinée, Yvette habilla, déshabilla sa patiente poupée. Toujours quelque raison d'apporter un changement à sa toilette.

Ah! Yvette! qu'il suffisait de peu de chose pour la rendre heureuse!"

André DUMAS Ma petite Yvette

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02/12/2012

Les dimanches poétiques (87)

- "Tout d'abord, il faut savoir écouter les hommes. Laissez-les parler, même s'ils dissertent sur un sujet où vous êtes plus compétente. Surtout si vous l'êtes! Et si vous ne l'êtes pas, absorbez leurs paroles comme une manne divine. En chaque homme sommeille un prophète. Pour un peu que sa Liebe Mama l'ait délaissé enfant, vous êtes une révélation. Avec votre minois de Sainte Vierge, cela ne devrait pas être un problème."

Yannick GRANNEC La Déesse des petites victoires

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18/11/2012

Les dimanches poétiques (86)

"I believe happiness is only possible if you follow your feeling, your intuition, your real desires. Only unhappiness is gained by acting in accordance with duty, or obligation, or guilt, or the desire to please others. You must accept happiness when you can, not selfishly, but remembering you are a part of the world, of others, not separate from them. Should people pursue their own happiness at the expense of others? Or should they be unhappy so others can be happy? There's no one who hasn't had to confront this problem."

Hanif KUREISHI The Buddha of Suburbia

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11/11/2012

Les dimanches poétiques (85)

" - Et des branleurs beaucoup du leur. Ils garderont jusque dans la tombe leur carte de presse utilisée jusqu'au bout, au-delà de la durée légale. Pour moi, selon le mot de François Mauriac, un journaliste est d'abord un homme qui réussit à se faire lire. En cette période de vacances, j'entends ou je lis des messages sur les animaux abandonnés au bord des routes. Dans mes souvenirs de jeunesse reviennent les livres et les légendes sur un animal solitaire, la Bagheera de Kipling, Kazan, le chien de James Oliver Curwood, son roi Grizzly. A l'inverse, un homme solitaire est un suspect, asocial, orgueilleux. La meute ne le chasse pas, elle se contente du renouvellement des pièges.

- Tu n'es pas un gibier aveugle comme une taupe.

- J'ai l'horreur du vide et je n'aime pas les souterrains. Je suis plus un homme de tranchée qu'un sapeur de galerie de mines. Je suis tombé dans des champs de barbelés tressés par des articles trop longs, quand le lecteur se perd, trop personnels quand il s'agit d'uniformiser l'opinion, trop lettrés quand on se contente de lire monsieur Guy Lux dans le texte."

Michel CAFFIER Porte-plumes au vent

28/10/2012

Les dimanches poétiques (84)

"Je cherchais de nouveau une oeuvre absolue, unique, je rêvais d'un livre qui pourrait par sa beauté refaire le monde. Et j'entendais la voix de ma grand-mère me répondre, compréhensive et souriante, comme autrefois, à Saranza, sur son balcon:

- Tu te rappelles encore ces étroits appartements en Russie qui croulaient sous les livres? Oui, des livres sous le lit, dans la cuisine, dans l'entrée, empilés jusqu'au plafond. Et des livres introuvables qu'on vous prêtait pour une nuit et qu'il fallait rendre à six heures du matin précises. Et d'autres encore, recopiés à la machine, six feuilles de papier carbone à la fois; on vous en transmettait le sixième exemplaire, presque illisible et appelé "aveugle"... Tu vois, il est difficile de comparer. En Russie, l'écrivain était un dieu. On attendait de lui et le Jugement dernier et le royaume des cieux à la fois. As-tu jamais entendu parler là-bas du prix d'un livre? Non, parce que le livre n'avait pas de prix! On pouvait ne pas acheter une paire de chaussures et se geler les pieds en hiver, mais on achetait un livre..."

Andreï MAKINE Le testament français

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