02/04/2018
Belle merveille - J. NOËL
La ville a tremblé en haut, la ville a tremblé en bas. Toute seule, le corps tremblant durant trente-cinq secondes, les flux montaient, la mer montait, c'est comme si la ville s'activait publiquement à s'envoyer en l'air.
Belle merveille est ma sixième lecture pour le Prix des lecteurs de l'Armitière. Un roman de 150 pages sur le tremblement de terre qui a touché Haïti en 2010 et le ressenti d'un homme, sa reconstruction après ce terrible événement, et ce qu'il a fait de sa vie.
C'est le premier roman de James Noël. Il écrivait jusque là de la poésie. D'ailleurs son style s'en ressent. La poésie est sous-jacente, elle affleure dans la sonorité des phrases, et façonne en grande partie le texte même si celui-ci est bel et bien un roman. C'est ciselé et ça fait mouche. Autant vous dire que le style m'a plu. En revanche, je n'ai pas vraiment accroché au sujet. Ce tremblement de terre a pourtant eu un retentissement énorme lorsqu'il s'est produit, et a fait l'objet d'une mobilisation incroyable qui plus est. Mais je ne sais pas, je n'ai pas adhéré totalement à l'histoire, bien que ce soit joliment raconté.
Alors mon avis est mitigé. D'un côté, l'histoire ne m'a pas emballée. De l'autre, le style vaut le détour. A vous de vous faire votre avis...
Belle merveille - James NOËL - Ed. Zulma - 2017
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01/04/2018
Elle ne s'était pas inquiétée
Le ronronnement des voitures de karting ne couvrait pas complètement le sifflement des avions qui s'élevaient dans le ciel. C'était infernal. Une après-midi là-bas et on était sourd toute la soirée. Milena avait tenu absolument à y aller ce jour-là, le jour où je lui avais fait ma demande. On avait pris des photos. Cela me fait bizarre de les regarder sans elle. Sourire noir et blanc sur ciel blanc. Elle était jolie dans sa robe écossaise sans manches.
C'est en faisant du rangement pour le déménagement que je suis tombé sur ce paquet de photos. Elle les avait mises dans une vieille boîte à chaussures qui prenait la poussière depuis des années sous l'armoire. Elle avait gardé tout ça pour conjurer la perte de mémoire, au cas où, en cas de maladie. Ca fait maintenant six mois qu'elle est partie. Et elle avait toute sa tête, sa mémoire était intacte. Elle pouvait citer le moindre détail de notre vie sans ressortir les photos. D'ailleurs, on n'en prenait plus beaucoup. Quelques unes pendant les vacances, l'été, avec les enfants. Quelques clichés à Noël quand le vieux barbu passait apporter les cadeaux. La dernière où l'on est tous les deux a été prise à nos cinquante ans de mariage. On ne savait pas trop si on allait les fêter. Elle était déjà malade. Ce putain de K avait déjà commencé à la bouffer, à la ronger, petit à petit, se repaissant de ses cellules pour en fabriquer de mauvaises.
Elle ne s'était pas inquiétée de perdre dix kilos en même pas trois mois. C'est la fatigue permanente qui l'avait poussée à consulter. Alerté par les symptômes le médecin lui avait prescrit un check-up complet. Le foyer primitif était logé dans les poumons. Les radios montraient par ailleurs des taches anormales sur les vertèbres. Deux métas osseuses. Une localisée en D4 et l'autre en D8.
La tumeur n'était "pas résécable". L'oncologue avait employé son jargon de médecin pour noyer le poisson. Et puis on lui avait demandé ce que voulait dire "pas résécable"... Je revois sa mine défaite, ses yeux baissés sur le dossier. Il avait fini par expliquer. On était sonnés, KO sur le ring. Putain d'uppercut! Restait la chimio à tenter, qui si elle n'éradiquait pas la maladie, permettrait de ralentir sa progression. Et on s'était battus. Ma Milena avait combattu comme une lionne, une mamma italienne qui tient la maison jusqu'au bout.
Y a tant d'amour, de souvenirs
Autour de toi, toi la mamma
Y a tant de larmes, et de sourires
A travers toi, toi la mamma...
Ce texte a été rédigé dans le cadre de l'atelier d'écriture Une photo, quelques mots initié par Leiloona. Il n'est pas libre de droits. La photo, d'ursulamadariaga, n'est pas libre de droits non plus.
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Les dimanches en photo (103)
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31/03/2018
Mars en quelques mots #18
Un thé "Jour de fête" accompagné de croquants à la noix de coco. Ou l'inverse // De nouveau mal à la gorge // Ne pas donner de faux espoirs. Faire comprendre sans dire les choses // Le bug de la banque... // Un regard lointain et une odeur qui nous disent que la mort n'est pas loin // Et vivre malgré tout ça parce que c'est le cours des choses // OREO saveur peanut butter. (Je suis faible!) // Pourquoi les gens veulent-ils toujours me raconter leur vie? (Est-ce que je leur raconte la mienne...) // S'installer chez Paul pour déjeuner et regarder passer la foule bigarrée (Ou comment manger un sandwich au camembert en buvant un café.) // Prendre soin de soi c'est important aussi // Aurais besoin d'un beau rayon de soleil... // Essayer de trouver un créneau pour s'échapper et mettre son cerveau sur pause // Un an de plus // Avancer l'écriture de la nouvelle en buvant un Flat White. (Installée confortablement chez Couleur Café.) // Courir. Au propre comme au figuré. (Quand cessera cette course effrénée? Pour aller où? Vers quoi?) // J'aimerais parfois vivre en ermite; qu'on me fiche la paix // Et puis il y a ces moments où il me faut voir du monde pour me sentir vivante... // Les chambres d'hôtes qui se mettent à faire payer le petit déj en sus. Manquent pas d'air! // On n'en avait pas fini avec la neige. Journée blanche // La Côte Fleurie. Et en avril ce sera l'île aux mimosas... // Laisser la nouvelle de côté. Pas satisfaite de ce que j'ai écrit. Laisser reposer. Je verrai plus tard s'il y a quelque chose à en tirer // Mais avoir peu de temps pour la lecture et l'écriture // Est-ce que les maisons d'éditions répondent toujours ou bien ne prennent-elles pas la peine d'envoyer même une lettre de refus? // "La solitude ça n'existe pas, la solitude ça n'existe pas..." chantait Gilbert Bécaud // Ciel étoilé // Il fallait que j'en parle... Première lettre de refus // Des haricots verts frais ce serait pas mal pour accompagner le baron d'agneau
26/03/2018
Les buveurs de lumière - J. FAGAN
- Gunn me disait qu'il y avait une île près de la Norvège, mais qui fait encore partie de l'archipel des Orcades, où vivait un groupe de moines qu'on appelait les pèlerins buveurs de lumière. Ils n'avaient rien d'autre à manger que des fous de Bassan et une année ils ont tous perdu la raison, alors ils se sont jetés du haut des falaises, ils étaient environ soixante-dix. Personne ne sait ce qui les y a poussés, mais ils étaient totalement isolés du continent et, même s'ils avaient un bateau, ils ne pouvaient pas aller chercher de l'aide avant le printemps. Ils sont tous morts, sauf un. On l'a retrouvé nu au sommet de la montagne, assis en lotus, en train de boire la lumière - de l'orange au gris.
Ce roman de Jenni Fagan fait partie de la sélection du Prix des lecteurs de l'Armitière. Je ne savais pas trop ce que j'allais découvrir en l'ouvrant, n'ayant lu aucune critique dessus et entendu aucune chronique. J'ai à peine regardé la quatrième de couverture en le choisissant. C'est une fois rentrée chez moi que je m'y suis intéressée de plus près. On m'annonçait des températures basses, très basses même, un hiver comme les habitants de Clachan Fells, situé au nord de l'Ecosse, n'en ont jamais connu. Et pour cause. L'histoire se déroule pendant l'hiver 2020-2021. Toute la planète est touchée par le phénomène. Il neige à Jérusalem, les blizzards et les vents paralysent l'Europe... Bref! On entre dans l'ère glaciaire. On atteint des records de températures négatives.
Et c'est à travers trois personnages que l'on vit cet hiver dans le parc à caravanes de Clachan Fells. Il y a tout d'abord Constance, bricoleuse de génie qui fait des provisions de bois et de nourriture pour tenir plusieurs semaines. Puis il y a sa fille, Stella - qui était encore il y a peu un petit garçon -, rejetée par ses camarades de classe et qui vit un véritable cataclysme hormonal. Enfin, il y a Dylan, un Londonien qui emménage dans une caravane reçue en héritage. Ces trois-là ont été cabossés par la vie. De différentes façons. Mais ils ont quelque chose en commun. Et ils vont s'apprivoiser.
Je lis très peu de romans d'anticipation et le début du livre ne m'emballait pas, notamment lorsque l'on suit Dylan dans ses derniers instants à Londres. Puis, j'ai continué à lire. Et le miracle a eu lieu. Les paysages décrits sont grandioses, les destins des personnages sont invraisemblables, et malgré le côté catastrophique de la situation, il y a une humanité qui se dégage de ce roman, une certaine sagesse, une vraie beauté. Ce fut une jolie lecture et qui pose beaucoup de questions.
Les buveurs de lumière - Jenni FAGAN - Ed. Métailié - 2017
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25/03/2018
Les dimanches poétiques (221)
"Selon l'évangile des gens de lettres (ces gens qui lisent le cœur penché afin de parler en italique), la mort d'un homme c'est la mort de tous les hommes. Je ne suis pas calé en maths, mais si la mort d'un seul homme peut rendre si lyriques les amateurs de belles oraisons funèbres, que dire alors de la mort de trois cent mille âmes."
James NOËL Belle merveille
08:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, littérature, lecture, actu, actualité | Facebook |
18/03/2018
Sauter l'obstacle
Darren essayait d'accélérer mais ses poumons refusaient de lui fournir davantage d'oxygène pour un effort supplémentaire. La barrière en bas de la prairie se rapprochait et elle semblait de plus en plus haute à mesure qu'il avançait. L'animal était toujours sur ses talons. Il semblait même gagner en vitesse. Il était énorme, puissant, les muscles tendus, prêt à écraser l'homme qu'il poursuivait. Darren n'osait pas se retourner. La sueur coulait le long de son dos, imprégnant toutes les couches de vêtements qu'il avait enfilés.
Quelle idée de vouloir couper à travers champs pour rentrer chez lui?! La maison du vieux McLeod n'était qu'à deux kilomètres par la route. Non, franchement, quelle idée! Pourquoi n'avait-il pas emprunté le même chemin qu'à l'aller? Deux kilomètres, ce n'était rien du tout, et les routes par ici n'étaient pas trop fréquentées. Il se rendait compte maintenant que ç'aurait été moins dangereux que le champ.
Plus que vingt mètres...
A présent la barrière lui paraissait énorme. Il essaya de se souvenir comment il sautait par-dessus la petite barrière de bois de la maison de ses parents quand il était enfant. La petite barrière de bois que son père fermait toujours à clé pour l'empêcher d'aller se balader.
Les sabots du taureau martelaient le sol et faisaient vibrer la terre. Darren ressentait les vibrations dans ses mollets. Il était à bout de souffle et pensait s'écrouler avant de pouvoir franchir l'obstacle. Son cœur tapait si fort sous ses côtes...
Cinq mètres...
Le tout était de prendre de l'élan au bon moment. Prendre un bon appui, mettre les jambes à l'horizontale... L'obstacle franchi Darren continua à courir. L'animal avançait à une telle vitesse qu'il n'allait pas arrêter sa course comme ça. Il était bien capable de voler lui aussi par-dessus la barrière. Mais après avoir parcouru dix mètres Darren entendit un grand fracas. Le taureau s'était encastré dans la barrière. La bête, écumante, beuglait de douleur et de rage. Darren ne se retourna pas. Il ne voulait pas voir l'ampleur des dégâts et continua à courir jusque chez lui.
Quelques semaines plus tard, alors qu'il lui rendait visite, le vieux McLeod lui raconta toute l'histoire de son plus beau taureau mort de folie. Il pensait que l'animal avait couru sans raison pendant des heures puis s'était encastré dans la barrière au bas de la prairie. Il l'avait découvert le lendemain matin, sans vie, avec des morceaux de bois fichés dans les chairs. Darren n'avait pas démenti les propos de son ami.
Ce texte a été rédigé dans le cadre de l'atelier d'écriture Une photo, quelques mots n°298 initié par Leiloona. Il n'est pas libre de droits, la photo non plus.
16:00 Publié dans Textes originaux | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : textes originaux, écriture, atelier d'écriture, littérature, écrivain, actu, actualité | Facebook |