21/01/2018
Entre Bari et Barletta
Berghetti avait conduit une bonne partie de la nuit. Il avait fait un premier arrêt pour remplir le réservoir puis, il s'était arrêté vers 2h du matin pour se reposer. Marcella, exténuée, ne s'était pas réveillée. Elle s'était endormie peu de temps après leur départ de Rome. C'est lui qui l'avait installée sur le fauteuil passager. Elle tenait à peine debout quand il l'avait récupérée en échange du CODE. Pietro l'avait bien aidé. Il n'aurait jamais pu déchiffrer seul le texte que le camerlingue lui avait donné. C'était le Saint Père lui-même qui avait ordonné qu'on lui remît le document. Sa Sainteté savait que plusieurs vies étaient en jeu, dont celle de Berghetti. Mais Francesco n'avait pensé qu'à Marcella. Il ne pouvait pas la laisser tomber. Elle qui l'avait secouru dans la via di Santa Dorotea lorsqu'il s'était fait attaquer à l'université. Sans son aide il n'aurait probablement jamais réussi à atteindre le cabinet médical de son frère.
Il avait dormi trois heures et était reparti, mettant le cap sur Molfetta, petite localité située sur la mer Adriatique, entre Bari et Barletta. Il avait appelé Tiberio pour lui indiquer que Marcella était sauve mais qu'il était nécessaire de l'éloigner de Rome. Elle n'y était plus en sécurité et il ne voulait pas courir le risque qu'elle se fasse kidnapper une seconde fois. Francesco savait que les types qui l'avaient enlevée n'hésiteraient pas à s'en servir à nouveau comme monnaie d'échange. Ils lui avaient aussi demandé de stopper ses recherches sur ces fous qui voulaient prouver l'existence de Dieu par des formules mathématiques, et que s'il continuait, ils se chargeraient de lui faire passer l'envie. Il devait aussi cesser ses conférences sur le sujet et ne rien en dire à ses étudiants. Francesco n'arrivait pas à s'y résoudre. Il ne voulait pas céder. Et il y aurait toujours bien un étudiant pour l'interroger sur cette question. Devrait-il alors occulter la vérité?
Francesco gara la voiture non loin du bain public de Prima Cala en fin de matinée. Le soleil jetait des perles irisées à la surface de l'onde. En ville les habitants cherchaient déjà l'ombre des murs, assis paresseusement sur des bancs. Francesco baissa sa vitre pour laisser entrer un léger vent. Marcella sentit le doux souffle lui caresser les joues. Elle resta ainsi un moment, à goûter l'air qui se répandait dans l'habitacle.
Textes précédents:
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18/01/2018
Pourquoi les oiseaux meurent - V. Pouchet
Il avait plu des oiseaux morts. J'ai répété ça aux bateliers sur le quai du port de Paris. Ils m'ont regardé étrangement. Pourtant, c'était très exact: il avait plu des oiseaux morts. Je suis allée de péniche en péniche, pour expliquer ma demande: descendre avec eux la Seine, pour observer les oiseaux, et pour atteindre les alentours de Rouen, où une série d'oiseaux morts était survenue.
J'avais repéré ce livre dans le magazine LiRE du mois de septembre 2017. Ce que j'en avais retenu, outre la pluie d'oiseaux morts, c'est que l'action se déroulait au fil de la Seine, et pas loin de chez moi.
Le héros, qui s'appelle Victor Pouchet (comme l'auteur), est intrigué par une pluie d'oiseaux morts survenue à Bonsecours, ville où il a passé son enfance. Cette pluie est comme un signe qui le rappelle vers un passé qu'il a fui des années plus tôt pour s'installer à Paris. Il décide de collecter le maximum d'infos sur ces volatiles qui tombent du ciel et dont tout le monde semble se contrefiche. Notre ornithologue en herbe remarque que ces pluies d'oiseaux morts ont lieu non loin de la Seine. Est-ce que le fleuve serait pour quelque chose dans ce phénomène pour le moins étrange? Notre Victor s'embarque alors sur un bateau de croisière pour mener l'enquête.
Et cette descente de la Seine va prendre les airs d'un voyage initiatique pour notre héros. Outre le fait de chercher des infos sur les oiseaux, il va se chercher lui aussi, à travers les passagers, les bras de Clarisse (la seconde du bateau), la maison de son enfance, et il va aller jusqu'à s'arroger une parenté avec Félix-Archimède Pouchet, médecin biologiste qui fut professeur d'histoire naturelle au Muséum de la ville de Rouen. Victor obtiendra-t-il assez d'infos pour se faire une opinion? Ces pluies ne sont-elles pas les prémices de quelque chose de plus grave?
Cette lecture fut agréable. Le texte est léger, espiègle et plein d'érudition. On accompagne avec plaisir Victor dans les méandres de la Seine, et dans cette quête qui va finir par le dépasser.
Pourquoi les oiseaux meurent - Victor POUCHET - Ed. Finitude - 2017
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15/01/2018
Joyeux Noël! - recueil de nouvelles
Voici, en revanche, quelques unes des choses qu'elle a faites, et fait encore: occire avec une binette le plus gros crotale jamais vu dans le comté (seize sonnettes), priser du tabac (en cachette), apprivoiser des colibris (essayez, pour voir!) jusqu'à ce qu'ils se posent sur son doigt, raconter des histoires de fantômes (nous croyons tous les deux aux fantômes) qui vous donnent des frissons même en plein mois de juillet, parler toute seule, partir se promener sous la pluie, cultiver les plus beaux japonicas de la commune, connaître la recette de toutes les médications indiennes d'antan, y compris un remède miracle contre les verrues.*
Joyeux Noël! est ma première lecture pour le Cold Winter Challenge. C'est un ensemble de nouvelles très éclectiques. Enfin, quand je dis nouvelles, ce n'est pas très exact. La majorité des textes est composée de nouvelles mais il n'y a pas que des nouvelles dans ce recueil. On y trouve également des poèmes.
Ce fut une lecture rapide mais mitigée. Peu de textes ont retenu mon attention. Quatre pour être précise, en comptant l'extrait du poème d'Apollinaire Les sapins. Je n'ai pas adhéré au reste, un peu hermétique aux styles et aux histoires, et pourtant j'aime les contes de Noël. Les trois nouvelles qui m'ont intéressée sont celle de Sylvain Tesson Les fées, celle de Guy de Maupassant Un Conte de Noël, et enfin celle de Truman Capote Un souvenir de Noël.
Ces trois derniers textes sont à lire, sans aucun doute, cependant je m'interroge sur la lecture des autres. Il y a peut-être eu un problème de sélection de la part de l'éditeur. C'est vraiment très inégal.
Joyeux Noël! - Recueil de nouvelles et poèmes - Ed. Folio - 2017
* Extrait de la nouvelle de Truman Capote citée plus bas.
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14/01/2018
Les dimanches poétiques (216)
"Il est infiniment probable qu'on ne meurt pas d'une maladie, d'un accident, voire de vieillesse: je prétends au contraire qu'on meurt de ce qu'on n'a pas vécu."
Frédéric BERTHET
(Exergue du livre de Victor Pouchet Pourquoi les oiseaux meurent)
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13/01/2018
Persistance rétinienne
Oui, elle l'avait vu apparaître à la surface de son bol de soupe à la tomate mais Marcella ne savait pas du tout à quoi renvoyait ce CODE. Pourquoi était-ce si important? Elle ne comprenait rien à ce que lui racontait ce petit bonhomme ventripotent à la tonsure de moine. Il allait d'un mur à l'autre, les mains dans le dos, posant toujours les mêmes questions. Et Marcella faisait toujours la même réponse. Elle ne savait pas. L'interrogatoire ressemblait à ceux réalisés à l'époque par le KGB. Il n'avait juste pas encore commencé à la torturer.
Ce CODE pouvait être n'importe quoi. Un mot sur un papier, un rébus à déchiffrer, un air de musique, un assemblage de lettres... Elle essayait de se souvenir, de se rappeler ce que lui avait dit Berghetti, s'il n'y avait pas un sens caché dans ses dernières paroles lorsqu'ils s'étaient quittés en ressortant du palais pontifical. Rien. Marcella avait juste remarqué une ombre passer furtivement dans son regard, comme s'il était préoccupé. Puis, il l'avait embrassée sur les deux joues et était parti de son côté, visiblement pressé. Marcella, quant à elle, n'avait pas eu le temps d'atteindre l'arrêt de bus pour rentrer. Deux types aux corps bodybuildés, costumes et lunettes noires, s'étaient placés à ses côtés et l'avait entraînée dans une rue perpendiculaire à la Via della Conciliazione. Elle espérait que deux autres types n'étaient pas en embuscade attendant de mettre la main sur Berghetti.
La pièce était très sombre et Marcella avait beaucoup de mal à distinguer les traits du type qui l'interrogeait. Il lui demanda à nouveau ce qu'était le CODE. Elle fouilla une fois de plus sa mémoire sans succès jusqu'au moment où elle se remémora cette persistance rétinienne d'un papier aux drôles de caractères qui dépassait de la poche intérieure de la veste de Francesco. Un papier que Marcella n'avait pas remarqué auparavant, du moins pas avant qu'ils ne soient reçus par un conseiller du Saint Père. Qui lui avait donné? Pourquoi ne lui en avait-il pas parlé? Plus elle y pensait et plus elle se disait que ce papier était la clé, que le CODE y était caché. Et Marcella se mit à prier pour que Berghetti trouve quelqu'un pour le déchiffrer rapidement. Elle n'avait aucunement envie que son geôlier se serve des outils entreposés sur la table placée dans un coin de la pièce...
Texte précédent: Il n'en croyait pas ses yeux
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11/01/2018
Je suis ce que je lis...
Il y a quelques jours l'Irrégulière proposait ce tag sur son blog. Je l'avais moi-même fait il y a quelques années et je me suis dit que ce serait intéressant de le refaire avec les lectures de l'an passé. Voici ce portrait pour le moins original...
Décris-toi: On la trouvait plutôt jolie
Comment te sens-tu: Une trop bruyante solitude
Décris où tu vis actuellement: L'enfant du lac
Si tu pouvais aller où tu veux, où irais-tu: Sur les chemins noirs
Ton moyen de transport préféré: Randonnée mortelle
Ton/ta meilleur(e) ami(e) est: Pour le meilleur et pour le pire
Toi et tes amis vous êtes: La mémoire des embruns
Comment est le temps: Le temps est assassin
Quel est ton moment préféré de la journée: Le jour d'avant
Qu'est la vie pour toi: Une très légère oscillation
Ta peur: Nozze Nere
Quel est le conseil que tu as à donner: Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
La pensée du jour: Alabama Song
Comment aimerais-tu mourir: Avec tes yeux
Les conditions actuelles de ton âme: Fleurs sauvages
Ton rêve: Le sel de la vie
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10/01/2018
La promesse de l'aube
Pourquoi j'ai choisi ce long métrage plutôt qu'un autre? Et bien sûrement pour son rapport à la littérature et pour en apprendre davantage sur Romain Gary, que je connais bien sûr de nom mais dont je n'ai jamais rien lu. Je n'avais aucun a priori sur le film. J'avais bien sûr entendu quelques critiques ici et là, avait écouté les acteurs défendre leur travail mais je ne m'étais pas fait d'idée sur la qualité du film.
Ce qui m'intéressait également c'était de voir le jeu de Charlotte Gainsbourg et sa crédibilité dans le rôle d'une femme parlant le polonais. Il faut savoir que Gary (ou plutôt Roman Kacew) a passé son enfance à Vilnius, ville qui était alors en Pologne. J'ai été bluffée lorsqu'elle s'exprimait en polonais dans le film. On sent qu'elle a beaucoup travaillé. En revanche je n'ai pas aimé son accent polonais quand elle parlait français. Il avait l'air de tout sauf d'un accent polonais, et je sais de quoi je parle. Mais elle y a mis tout son cœur et elle est crédible dans cette mère à la fois possessive et légère qui demande à son fils de devenir Victor Hugo. Rien de moins.
Je ne saurais vous dire si le film est fidèle au livre ou bien si le réalisateur l'a adapté librement. La seule chose certaine c'est que la Promesse de l'aube (ici le bouquin) est tout sauf une autobiographie de Romain Gary. Il y raconte certes des pans entiers de sa vie, mais de façon largement romancée. Où se trouve la frontière entre le réel et la fiction? Mystère. Ceci étant dit, j'ai passé un bon moment devant ce long métrage même si je n'ai pas été complètement convaincue par Pierre Niney.
La promesse de l'aube - Eric BARBIER - Avec Pierre Niney, Charlotte Gainsbourg, Didier Bourdon, Jean-Pierre Darroussin... - 2017
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