27/02/2018
Ce qu'on entend quand on écoute chanter les rivières - B. NORRIS
Je n'imagine pas une vie digne de ce nom qui ne s'enchevêtre pas à une autre comme le lierre. Le quotidien prend du relief et de l'importance quand on fait rire l'autre, quand on l'émeut, quand on crée à deux un motif plus riche. Pour moi, c'est la seule véritable beauté en ce monde.
Ce qu'on entend quand on écoute chanter les rivières est ma troisième lecture pour le Prix des lecteurs de l'Armitière. C'est un très beau premier roman. Barney Norris, jeune dramaturge anglais, nous emporte avec sa plume qui décrit merveilleusement les sentiments humains et les ressentis de plusieurs personnes qui vont se croiser lors d'un accident. Cinq personnes au total, impliquées à divers degrés, qui prennent chacune leur tour la parole dans des parties bien distinctes.
La première s'appelle Rita, une vieille dame fleuriste et vendeuse d'herbe à l'occasion, cabossée par la vie, au sens propre comme au sens figuré. Il y a ensuite Sam, jeune homme timide qui fait l'expérience des premiers émois amoureux. Vient ensuite un vieil homme dont la femme est morte à l'hôpital le jour-même de l'accident. Puis il y a cette femme de soldat, esseulée, au bord de la dépression, qui se bourre de cachets et qui s'en veut. Enfin, nous faisons la connaissance de Liam, un trentenaire qui a du mal à trouver sa place dans la vie.
Chaque personnage prend la parole et nous raconte sa vie avant ou après l'accident, nous raconte l'enchaînement des événements, ce qui l'a conduit à être là au moment du drame. Et l'auteur pointe avec subtilité les hasards et les coïncidences que nous réserve la vie. Il y a de très beaux passages. Un texte fort. A lire!
Ce qu'on entend quand on écoute chanter les rivières - Barney NORRIS - Ed. du Seuil - 2017
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21/02/2018
Et vous avez eu beau temps? - Ph. DELERM
Un long silence. On est surpris soi-même à la fois de l'assurance et de la douceur cauteleuse avec laquelle on dit:" Nous allons vous laisser." C'est une personne âgée que l'on est venu visiter au cœur de l'après-midi, chez elle, ou bien à l'hôpital. Pas une très proche. Quelqu'un que l'ordinaire de la vie nous faisait rencontrer souvent, et qu'on ne voit plus depuis qu'elle a été chassée du jeu. On sait que ses journées sont tellement vides, désormais. Ce n'est pas tant la longueur de la visite qui compte. Plutôt l'idée qu'on est passé, instaurant dans son jour un amont et un aval.
Cela faisait assez longtemps que je n'avais pas lu un bouquin de Philippe Delerm. Et puis il était de passage à la librairie l'Armitière il y a quelques semaines pour présenter Et vous avez eu beau temps? alors je suis allée l'écouter. Et bien sûr je suis repartie avec le bouquin.
Il y démonte et décortique des petites phrases du quotidien qu'on prononce souvent machinalement, sans mesurer toute la perfidie qu'elles contiennent. Et c'est vrai, elles sont assez perfides, ces petites phrases, certaines même plus que d'autres.
Ainsi il nous parle des gens, du temps qui passe, des enfants qui grandissent, des bravaches et des vantards. Ca se lit par petits bouts, ça se laisse fondre sur la langue, un peu comme des bonbons acidulés. Ca pique un peu mais on aime ça et on en reprend.
Un moment de lecture sympathique pour les soirées au coin du feu ou à garder pour lire sur un banc à l'arrivée du printemps.
Et vous avez eu beau temps? - Philippe DELERM - Ed. du Seuil - 2018
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13/02/2018
Christmas Pudding - N. MITFORD
J'avais acheté ce livre pour le Cold Winter Challenge et j'ai réussi à le lire dans le temps imparti même si je n'ai lu que deux livres sur les trois prévus.
Nancy Mitford était pour moi une parfaite inconnue. Elle est née à Londres au tout début du 20ème siècle et a passé une grande partie de sa vie en France. Elle a connu le succès en 1945 avec son roman A la poursuite de l'amour. Et elle a été très productive, dépeignant avec humour et espièglerie les travers de ses contemporains dans de nombreux romans.
Christmas Pudding montre à la fois la sagesse et la bêtise humaine sur fond de fêtes de fin d'année. Un petit groupe de jeunes gens de la société londonienne, mené par Amabelle Fortescue, se retrouve à la campagne dans le Gloucestershire pour passer Noël. Non loin de là vit Lady Bobbin et ses enfants. Les uns et les autres se connaissent et les péripéties ne vont pas manquer. Lady Bobbin engage pour son fils un précepteur qui en réalité n'en est pas un mais qui rêve d'écrire une biographie sur une ancêtre de celle-ci. Le fils est dans la confidence tout autant que Miss Fortescue qui s'est faite fort de faire engager le dit précepteur. Les dialogues sont mordants, les personnages ont de la repartie, et tel est pris celui qui croyait prendre.
Ce fut donc un moment de lecture plutôt plaisant mais l'histoire en elle-même ne m'a pas subjuguée. Une petite fantaisie pour égayer les journées froides et enneigées. Ce ne fut pas un coup de cœur. Ca se lit. Point.
Christmas Pudding - Nancy MITFORD - Ed. 10-18 - 2017
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28/01/2018
Un Astronaute en Bohême - J. KALFAR
Être en vie, n'était-ce pas être un fantôme, étant donné le caractère involontaire de l'origine de l'homme dans l'utérus? Personne ne peut garantir une vie heureuse, une vie sûre, une vie sans offenses, physique ou spirituelle. Pourtant, nous émergeons des canaux de naissance à une vitesse faramineuse, désireux de vivre, de flotter vers Mars à la merci d'une technologie spartiate ou de vivre des vies plus simples sur Terre, à la merci du hasard.
Un Astronaute en Bohême est ma deuxième lecture pour le Prix des lecteurs de l'Armitière. Ce fut une lecture assez déconcertante et quelques jours après avoir refermé le livre je n'arrive pas à dire si j'ai aimé ou non l'histoire. Il y a des choses intéressantes dans ce roman, notamment des réflexions existentielles. Mais le style m'a bien souvent laissée perplexe ainsi que cette façon de passer du coq à l'âne dans un même chapitre.
Jakub Prochazka, professeur assistant en astrophysique à l'université Karlova, se voit confier une mission dans l'espace par le gouvernement tchèque. L'objectif est d'aller récupérer des échantillons de poussière de Chopra, un nuage situé au-delà de l'orbite des planètes. Mais la conquête spatiale tchèque n'en est qu'à ses débuts et Jakub est le premier astronaute (et le seul) à être envoyé dans l'espace. Avec quels moyens techniques part-il? Les ingénieurs ont-ils pensé à tout? Jakub laisse derrière lui Lenka, sa femme. Est-elle prête à vivre la séparation? Lui a-t-il d'ailleurs demandé son avis lorsqu'il a accepté la mission? Et malgré les mois de préparation, Jakub est-il prêt à partir?
Si le décollage de l'engin de la colline de Petrin est un réel succès, la mission s'annonce quant à elle plus compliquée, notamment à partir du moment où Lenka refuse de s'entretenir avec Jakub par caméras interposées. Notre astronaute devient à moitié fou. Il a des hallucinations. Il voit un drôle d'animal s'approcher de la capsule. Réel? Pas réel? Pour lui la bête est bien vivante et il va finir par sympathiser avec elle, et s'adresser à elle tout au long du voyage. Et il va beaucoup lui parler, notamment de son passé. De son enfance, de ses parents et en particulier de son père qui était à la botte du Parti communiste, de ses grands-parents qui vivaient à Streda avant d'être chassés de leur ferme...
Autant vous dire que c'est une histoire un peu folle que Jaroslav Kalfar nous raconte-là. Une histoire à travers laquelle il pointe l'absurdité des comportements humains. Il dénonce aussi bien le Communisme que le monde consumériste et libéral qui s'abat sur l'Europe centrale après la chute du mur de Berlin. Il nous parle aussi de l'attachement amoureux, de la relation de couple. C'est un livre qui a de bonnes idées, mais j'avoue que j'ai eu beaucoup de mal avec le style.
A vous de vous faire votre idée. Et je suis curieuse de savoir ce que vous en avez pensé.
Un Astronaute en Bohême - Jaroslav KALFAR - Ed. Calmann-Lévy - 2017
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18/01/2018
Pourquoi les oiseaux meurent - V. Pouchet
Il avait plu des oiseaux morts. J'ai répété ça aux bateliers sur le quai du port de Paris. Ils m'ont regardé étrangement. Pourtant, c'était très exact: il avait plu des oiseaux morts. Je suis allée de péniche en péniche, pour expliquer ma demande: descendre avec eux la Seine, pour observer les oiseaux, et pour atteindre les alentours de Rouen, où une série d'oiseaux morts était survenue.
J'avais repéré ce livre dans le magazine LiRE du mois de septembre 2017. Ce que j'en avais retenu, outre la pluie d'oiseaux morts, c'est que l'action se déroulait au fil de la Seine, et pas loin de chez moi.
Le héros, qui s'appelle Victor Pouchet (comme l'auteur), est intrigué par une pluie d'oiseaux morts survenue à Bonsecours, ville où il a passé son enfance. Cette pluie est comme un signe qui le rappelle vers un passé qu'il a fui des années plus tôt pour s'installer à Paris. Il décide de collecter le maximum d'infos sur ces volatiles qui tombent du ciel et dont tout le monde semble se contrefiche. Notre ornithologue en herbe remarque que ces pluies d'oiseaux morts ont lieu non loin de la Seine. Est-ce que le fleuve serait pour quelque chose dans ce phénomène pour le moins étrange? Notre Victor s'embarque alors sur un bateau de croisière pour mener l'enquête.
Et cette descente de la Seine va prendre les airs d'un voyage initiatique pour notre héros. Outre le fait de chercher des infos sur les oiseaux, il va se chercher lui aussi, à travers les passagers, les bras de Clarisse (la seconde du bateau), la maison de son enfance, et il va aller jusqu'à s'arroger une parenté avec Félix-Archimède Pouchet, médecin biologiste qui fut professeur d'histoire naturelle au Muséum de la ville de Rouen. Victor obtiendra-t-il assez d'infos pour se faire une opinion? Ces pluies ne sont-elles pas les prémices de quelque chose de plus grave?
Cette lecture fut agréable. Le texte est léger, espiègle et plein d'érudition. On accompagne avec plaisir Victor dans les méandres de la Seine, et dans cette quête qui va finir par le dépasser.
Pourquoi les oiseaux meurent - Victor POUCHET - Ed. Finitude - 2017
14:00 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livres, littérature, lecture, pourquoi les oiseaux meurent, victor pouchet, actu, actualité | Facebook |
15/01/2018
Joyeux Noël! - recueil de nouvelles
Voici, en revanche, quelques unes des choses qu'elle a faites, et fait encore: occire avec une binette le plus gros crotale jamais vu dans le comté (seize sonnettes), priser du tabac (en cachette), apprivoiser des colibris (essayez, pour voir!) jusqu'à ce qu'ils se posent sur son doigt, raconter des histoires de fantômes (nous croyons tous les deux aux fantômes) qui vous donnent des frissons même en plein mois de juillet, parler toute seule, partir se promener sous la pluie, cultiver les plus beaux japonicas de la commune, connaître la recette de toutes les médications indiennes d'antan, y compris un remède miracle contre les verrues.*
Joyeux Noël! est ma première lecture pour le Cold Winter Challenge. C'est un ensemble de nouvelles très éclectiques. Enfin, quand je dis nouvelles, ce n'est pas très exact. La majorité des textes est composée de nouvelles mais il n'y a pas que des nouvelles dans ce recueil. On y trouve également des poèmes.
Ce fut une lecture rapide mais mitigée. Peu de textes ont retenu mon attention. Quatre pour être précise, en comptant l'extrait du poème d'Apollinaire Les sapins. Je n'ai pas adhéré au reste, un peu hermétique aux styles et aux histoires, et pourtant j'aime les contes de Noël. Les trois nouvelles qui m'ont intéressée sont celle de Sylvain Tesson Les fées, celle de Guy de Maupassant Un Conte de Noël, et enfin celle de Truman Capote Un souvenir de Noël.
Ces trois derniers textes sont à lire, sans aucun doute, cependant je m'interroge sur la lecture des autres. Il y a peut-être eu un problème de sélection de la part de l'éditeur. C'est vraiment très inégal.
Joyeux Noël! - Recueil de nouvelles et poèmes - Ed. Folio - 2017
* Extrait de la nouvelle de Truman Capote citée plus bas.
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09/01/2018
Le camp des autres - Th. VINAU
Jean-le-blanc a utilisé des mots simples, pour dire des choses simples. Il a dit J'ai choisi un camp. Le camp de ceux dont ne veut pas. Le camp des nuisibles, des renards, des furets, des serpents, des hérissons. Le camp de la forêt. Le camp de la route et des chemins aussi. De ceux qui vivent sur les chemins. De la trime et de la cloche. Des romanichels et des bohémiens.
Le camp des autres est ma première lecture pour le Prix des lecteurs de l'Armitière. Je n'avais lu aucun roman de Thomas Vinau auparavant et ce fut une belle découverte. J'ai certes aimé l'histoire, mais j'ai surtout aimé le style. Une fluidité, une rapidité dans l'enchaînement des mots, comme s'il avait écrit dans l'urgence, à bout de souffle, avec ses tripes et avec son cœur.
C'est l'histoire de Gaspard, un enfant violenté par son père qui se réfugie dans la forêt avec son chien blessé. Son idée est de mettre le plus de distance possible entre lui et son paternel. Il va errer plusieurs jours dans le froid, la boue, au milieu des animaux sauvages. Même le ventre tordu par la faim il continue à mettre un pied devant l'autre pour ne pas se faire rattraper. Mais il s'épuise. Son chien est lui aussi dans un piteux état. Quand enfin il met la main sur un collet, il est tout heureux. Il se réjouit du festin qu'ils vont faire lui et son chien. Cependant, ils ne sont pas les seuls à avoir faim. Un vieux loup rôde, alléché par l'odeur du lapin.
Quelques heures plus tard Gaspard est trouvé par un drôle de bonhomme qui se fait appeler Jean-le-blanc. Est-il sorcier? Est-il enseignant? Quels secrets cache-t-il? Il est bientôt visité par une troupe de bohémiens, romanichels ou voleurs, Gaspard ne sait pas très bien. Mais il est attiré par eux, par leur vie sur les chemins. Et malgré l'hospitalité de Jean-le-blanc, le gamin part les rejoindre. Ceux-là, ayant à leur tête Capelo, partent retrouver la Caravane à Pépère.
Un texte minéral qui sent le sous-bois, l'humus et la boue. Un texte au goût de sang et de cendres, qui met les sens en éveil et qui tient en haleine du début à la fin.
Le camp des autres - Thomas VINAU - Ed. Alma - 2017
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