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04/01/2018

Le jour d'avant - S. CHALANDON

livres,littérature,lecture,sorj chalandon,le jour d'avant,éditions grasset,actu,actualité"- Ce héros du travail est mort de silicose le 4 novembre 1960. Mort de fidélité. Mort de loyauté. Est-il mort à la mine? Mais oui, bien sûr! Evidemment! Même s'il a fermé les yeux au fond de son lit, c'est au fond du trou qu'il a rendu l'âme. Ce n'est pas parce qu'un mineur remonte qu'il est encore vivant. Lorsqu'il a déposé sa taillette de lampe pour la dernière fois, le matricule 9823 était déjà mourant. Il le savait. Sa famille le  devinait. Et il est passé d'une fosse à l'autre, comme ça, dans l'indifférence générale. Pas un officiel devant sa pauvre tombe. Pas une écharpe tricolore. Pas un visiteur de Paris. Ni discours, ni promesse, ni fleurs de la Nation. Rien."

Ce bouquin m'a fichu un uppercut. C'est fort, très fort. Je suis passée par plein d'émotions. Et j'ai même versé une larme. Pas facile de s'inspirer d'un drame collectif pour bâtir un roman. Et pourtant Sorj Chalandon réussit magistralement à nous entraîner avec lui, au côté de Jojo, mineur mort à trente ans, et surtout au côté de Michel, son frère.

L'auteur aurait pu choisir de faire une simple chronique de la catastrophe de la fosse Saint-Amé qui a eu lieu en décembre 1974. Il aurait pu ne relater que la dure vie des mineurs au fond, de l'hypocrisie des patrons  cherchant à faire toujours plus de profits. Il aurait pu opposer les faibles aux forts, les pauvres aux riches. Mais non, il a imaginé autre chose.

Ainsi, c'est Michel qui prend la parole. Il raconte son frère, Jojo, mécano qui veut aller travailler à la mine, et son père, paysan qui essaie de  le dissuader d'aller au charbon. Mais le fils tient bon et quitte la maison pour s'installer dans un appartement avec Sylwia, sa presque femme. Plusieurs années vont s'écouler. Michel rend visite régulièrement à son frère et il dort parfois chez lui. D'ailleurs, il était là la veille de la catastrophe, arrivé pour passer la nuit. Jojo doit prendre son poste à 4h30 le lendemain matin. Cela fait cinq jours qu'aucun gars n'est descendu et les veines n'ont pas été arrosées. Le coup de grisou était inévitable. Quarante-deux hommes sont fauchés le 27 décembre. Jojo, lui, meurt le 22 janvier 1975 à l'hôpital. Un an plus tard, jour pour jour, leur père met fin à ses jours en laissant quelques mots sur une feuille pliée dans sa poche.

Quel a été l'impact de ces événements sur Michel? Qu'est-ce que son père avait écrit sur cette feuille? Comment Michel s'est-il approprié la réalité? Est-ce la mine qui a tué son frère? Il s'en persuade en tout cas, jusqu'à remplir des cahiers d'informations et de détails sur les Houillères du Nord, sur les chefs et les sous-chefs qui surveillent l'avancée de l'abattage. Il se crée une sorte de mausolée dans un box de garage où il entasse les souvenirs de la mine, ceux de son frère, et puis d'autres glanés au fil des ans. Il n'a jamais beaucoup parlé de tout ça avec sa femme, Cécile, emportée par un cancer récemment. Mais la douleur, ineffable, ravive celle qu'il avait essayé d'enfouir. Il faut qu'il règle ses comptes avec la mine, et il trouve un coupable: Lucien Dravelle, le chef porion, qui n'a pas assuré la sécurité de ses hommes, qui leur disait que trop de sécurité ralentissait la cadence. Alors après la mort de Cécile, il retourne dans le Nord et cherche Dravelle. L'homme qu'il retrouve est en fauteuil roulant et oxygéno-dépendant. Le bonhomme a les poumons silicosés. Mais Michel maintient son plan, il faut que quelqu'un paye pour la mort de Jojo, car aucun procès n'a eu lieu pour juger les responsables de la catastrophe. En s'en prenant à Dravelle qu'espère-t-il au juste? Veut-il vraiment que les responsables de la catastrophe soient jugés? Ou ne cherche-t-il pas à se délester d'un fardeau devenu trop lourd à porter?

Chalandon explore les replis de l'âme humaine avec brio. Rien n'est blanc, rien n'est noir. Il y a toute une nuance de gris dans chaque être. Chacun a sa part d'ombre et sa part de lumière. Un roman qui m'a fait forte impression tant par le style que par le fond. Ca fait mouche à chaque phrase, les dialogues sont ciselés. Un petit bijou.

Le jour d'avant - Sorj CHALANDON - Ed. Grasset - 2017

03/01/2018

Les secrets de Thornwood House - A. ROMER

livres,littérature,littérature anglophone,les secrets de thornwood house,anna romer,actu,actualitéJe suis sortie à mon tour et j'ai fait quelques pas dans les hautes herbes en contemplant la maison que Tony m'avait léguée. Perchée sur un promontoire, brillant légèrement sous la lumière crue du soleil, elle resplendissait d'une gloire déclinante.

Encore un livre que je n'aurais pas lu si on ne me l'avait pas prêté. L'histoire se passe en Australie, et plus précisément dans le bush même si le début du roman est situé à Melbourne. La nature a une part importante dans le livre et on sent qu'Anna Romer s'y intéresse de près. Noms de fleurs et d'arbres sont légions, et ils sont magnifiquement décrits. Le paysage est un personnage à part entière de l'histoire et a toute son importance.

Audrey a aimé follement Tony, artiste peintre, avec qui elle a eu une fille. Mais leur romance n'a pas duré. Ils se sont séparés. Quelque six ans plus tard, alors que Tony était remarié et qu'il avait deux garçons, il se suicide à Magpie Creek, le village de son enfance. Audrey apprend quelques semaines plus tard que son ex lui a légué une maison, la maison qui avait appartenu à son grand-père. La première chose à laquelle pense Audrey c'est de la retaper un peu pour la revendre et reprendre sa vie d'avant.  Mais Bronwyn, sa fille, passionnée de biologie et de bestioles en tous genres, a envie d'y habiter. Et Audrey est elle-même est fascinée par la maison. Elles s'y installent donc. Audrey fait des rêves étranges et ne se sent bien que dans la chambre qui avait appartenu au grand-père de Tony. Elle y découvre une photo de lui, et puis une lettre, pour le moins étrange. Audrey ne peut pas s'empêcher de fouiller le passé et elle va faire de drôles de découvertes. Des crimes ont été commis...

Autant vous le dire tout de suite, ce bouquin est un vrai page-turner. Même si certaines situations sont angoissantes, on ne peut s'empêcher de continuer à lire. On avance sur un fil, on a peur, on a froid, on a chaud, on se demande comment tout va se terminer pour Audrey et Bronwyn... L'intrigue nous ferre rapidement et j'ai beaucoup aimé la nature à foison. Un livre pour les fans de suspense.

Les secrets de Thornwood house - Anna ROMER - Ed. Pocket - 2017

23/12/2017

Livres à offrir à Noël... ou pas!

Si vous n'avez pas encore trouvé le cadeau de tonton Robert ou de mamie Jeanne, don't panic! Il vous reste une journée entière pour trouver un cadeau, autant dire une éternité pour les habitués de la procrastination. Même si cette année le 24 décembre tombe un dimanche, les magasins seront ouverts. Peut-être pas tous, mais une grande majorité.

Et bien sûr, les libraires vous accueilleront à bras ouverts. Quoi de mieux qu'un livre? Il y en a forcément un qui plaira au tonton ou à la mamie. Et même si les bouquins proposés ne vous emballent pas sachez que les librairies ne vendent pas exclusivement des livres. Bon, n'essayez pas non plus d'y trouver un panier garni ou un paquet de chocolats (encore que...), vous risquez de vous casser les dents. Vous pourriez trouver un beau stylo pour le tonton ou bien un sac pour mamie.

Bien sûr, si ces deux-là sont lecteurs, optez quand même plutôt pour des livres. Ci-dessous une petite sélection de ceux qui m'ont plu cette année.

Pour quelqu'un qui aime les romans policiers mais pas les atmosphères lugubres:

Quand sort la recluse de Fred Vargas

On la trouvait plutôt jolie de Michel Bussi

Pour un amoureux des livres qui s'intéresse à la littérature d'Europe centrale:

Une trop bruyante solitude de Bohumil Hrabal

Pour quelqu'un qui s'intéresse à l'actualité politique (et ouvert d'esprit):

Emmanuel Macron un jeune homme si parfait d'Anne Fulda

Pour une personne qui aime voyager (loin ou à pied), je vous conseille un roman et deux essais:

Fleurs sauvages, un roman de Kimberley Freeman qui se passe en grande partie en Australie. Une très belle histoire.

Sur les chemins noirs de Sylvain Tesson. Il raconte sa traversée de la France à pied et sa longue reconstruction après sa chute et ses longs mois d'hôpital.

Une très légère oscillation rassemble des chroniques de Sylvain Tesson parues dans plusieurs magazines entre 2014 et 2017.

Pour un amoureux de la musique:

La Sonate à Bridgetower d'Emmanuel Dongala. Ou comment la Sonate à Kreutzer n'aurait pu ne jamais exister...

Pour un ami exceptionnel:

Un saint homme d'Anne Wiazemsky, où elle parle de l'amitié qui l'a unie au père Deau (son premier professeur de français) tout au long de sa vie.

Voilà, vous avez maintenant toutes les cartes en main. Si tonton Robert et mamie Jeanne n'ont pas de cadeau, ce ne sera pas ma faute!

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20/12/2017

13 à table!

9782266279529[1].jpgLe nouveau recueil de nouvelles 13 à table! est sorti en novembre. Depuis trois ans maintenant les éditions Pocket apportent leur soutien aux Restaurants du cœur en éditant un livre. Ainsi, une dizaine d'auteurs sont sollicités pour écrire une nouvelle avec un thème imposé. Cette année ils devaient réfléchir à l'amitié.

J'ai aimé plusieurs nouvelles de ce recueil notamment L'escalier de Karine Giebel, Je suis Li Wei de Michel Bussi, Best-Seller d'Eric Giacometti et Jacques Ravenne, et l'incroyable stylo Bic quatre couleurs de Benjamin Bloom de Romain Puértolas. Il y en a certaines en revanche qui m'ont franchement déçue. Je tairais les titres. Une déception peut-être due au style de certains auteurs. Et du coup, ça ne me donne pas envie d'aller ouvrir un livre de ces écrivains-là!

Ceci étant dit, l'achat d'un recueil permet aux Restos du cœur de distribuer quatre repas. Alors, même si les nouvelles sont assez inégales, dites-vous que c'est pour la bonne cause.

13 à table! (2018) - Ed. Pocket - 2017

12/12/2017

On la trouvait plutôt jolie - M. BUSSI

littérature,polars,michel bussi,on la trouvait plutôt jolie,actu,actualitéLe dernier polar de Michel Bussi a paru début octobre. C'est le onzième. Et, foi de Do, c'est l'un des meilleurs de l'auteur. Contrairement à ses autres bouquins, il traite d'un sujet d'actualité. Il y a, bien sûr, une intrigue policière en toile de fond mais c'est à mes yeux un roman social et géopolitique. Michel Bussi nous parle des migrants de la Méditerranée, des conditions de passage vers un avenir meilleur, du trafic organisé autour de ce flux migratoire, et de l'intégration des migrants dans notre société.

A travers l'histoire de Leyli, qui vit dans le quartier prioritaire des Aigues Douces à Port-de-Bouc, l'auteur nous conte le parcours d'une femme cabossée par la vie, tout d'abord au Mali, puis au Maroc, d'où elle émigrera vers la France après diverses péripéties et coups du sort. Leyli est jolie, et les hommes ne sont pas insensibles à ses charmes. Une beauté à double tranchant. Elle va en rencontrer beaucoup des hommes. Parfois contre son gré. De ces rencontres, plus ou moins consenties, vont naître trois enfants: Bamby, l'aînée, Alpha, un garçon qui joue les gros durs, et Tidiane, le petit dernier, âgé d'une dizaine d'années.

Mais Leyli cache un secret. Un secret que je ne peux pas vous révéler car sinon je vous donne une clé essentielle du roman, laquelle a été placée dans le dernier tiers de l'histoire pour justement nous balader avant. Ce fut un excellent moment de lecture car, si l'intrigue est extrêmement bien menée, j'ai aussi beaucoup aimé le portrait des différents personnages, et notamment ceux faits des hommes, qui ne sont pas ménagés. Michel Bussi les a bien chargés et on pourrait croire que le roman a été écrit par une féministe. Ceci étant dit, il y a quand même des hommes fréquentables dans ce bouquin. Mais pas beaucoup.

Un livre à lire en tout cas.

On la trouvait plutôt jolie - Michel BUSSI - Ed. Presses de la Cité - 2017

06/12/2017

Un clafoutis aux tomates cerises - V de BURE

livres,lecture,littérature,véronique de bure,un clafoutis aux tomates cerises,actu,actualitéJe crois qu'avec l'âge je deviens de plus en plus égoïste. Je ne prends plus le temps de m'arrêter sur les peines de ceux qui ne sont pas moi. Peut-être parce que, du temps, il m'en reste si peu. Je me rends compte que beaucoup de choses me deviennent indifférentes. On dirait qu'à mesure que la vie se rétrécit le cœur se dessèche. Comme le reste, les sentiments s'usent. La colère se tempère, l'affection s'assoupit, la compassion s'étiole. Le bruit du monde ne nous parvient plus que de très loin, vague écho d'une vie qui ne nous concerne plus.

Je n'aurais sans doute jamais lu ce livre si on ne me l'avait pas prêté. Je ne connaissais pas l'auteur. Véronique de Bure n'en est pas à son coup d'essai. Elle a déjà écrit plusieurs ouvrages parmi lesquels Une confession (Stock 2009) et Un retraité (Stock 2011). Un clafoutis aux tomates cerises traite de la vieillesse - tout particulièrement du 4ème âge - et du temps qui passe.

Ainsi nous partageons le quotidien de Jeanne, nonagénaire qui vit encore toute seule dans sa maison à la campagne. Elle nous livre ses impressions sur les petits événements qui surviennent dans sa vie, celle de ses voisins, et celle de ses amis. Sous forme de journal intime qu'elle tient sur une année on découvre ses petits ennuis de santé, les péripéties de sa voisine Marcelle, les coups du sort qu'endurent ses amies, les mises en garde de ses enfants qui s'inquiètent beaucoup pour elle alors qu'elle, elle ne voit pas le danger. Elle fait quelques retours en arrière, nous parle de ses souvenirs de la guerre, évoque son mari et les débuts de son mariage.

Mais Jeanne trouve le temps long. Elle ne comprend plus grand chose de ce qui se passe aujourd'hui. Il y a certes les parties de bridge avec les copines, la messe le dimanche, la visite des enfants de temps en temps mais elle vieillit et les autres aussi. Plus le temps passe, plus elle enterre de monde. La voisine perd la boule, ses amies tombent malade... Bref, elle se demande combien de temps cela va-t-il encore durer.

Parler de la vieillesse n'est pas simple et l'angle choisi par l'auteur est original. Jeanne est une petite bonne femme attachante avec tous les tics et les problèmes d'une personne âgée. Elle a du mal à se mobiliser, quelques pertes de mémoire, des problèmes d'auditions. Un regard assez pertinent sur le 4ème âge qui peut permettre à de grands enfants de mieux comprendre leurs parents.

Un clafoutis aux tomates cerises - Véronique de BURE - Ed. Flammarion - 2017

05/12/2017

Best book of 2017

Si je ne dois retenir qu'un livre de 2017, c'est sans aucun doute Une trop bruyante solitude de Bohumil Hrabal. C'est triste à mourir mais tellement splendide. Un livre qui nous parle d'un homme qu'on ne voit pas, qui vit à la lisière de la société, qui travaille poétiquement dans un sous-sol à essayer de sauver des livres jetés au pilon. Un homme qui passe malheureusement trop de temps à ouvrir les bouquins et qui n'est pas assez rentable. On remplace sa presse par de plus grosses machines. C'est comme si lui aussi était jeté au rebut...

Je recommande vivement cet ouvrage à tous les amoureux des livres.

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